Réalisé par Jacques Richard et Maîtresse Léïa. France. Documentaire. Durée : 1h30. (Sortie le 4 mai 2011).
Jacques Richard, qui n’est pas un novice en matière de cinéma sulfureux, s’est associé à une spécialiste, Maîtresse Léïa, pour une immersion didactique dans le sado-masochisme.
De leur association est sorti "D/s" un documentaire à ne pas mettre devant tous les yeux, mais qui devrait déniaiser question cuir et fouet les spectateurs peu avertis et bien curieux auxquels il est destiné.
Dans l’inconscient collectif marqué par les "Histoires d’O" et les bédés cultes de "Gwendoline", le sado-masochisme est forcément chic et s’adresse à des fesses d’élite du type de celles qui sont savamment éclairées dans des boîtes huppées comme le "Crazy Horse" et que l’on ne peut rêver de caresser qu’avec des mains gantées ou finement manucurées.
Le premier mérite de "D/s" est donc de faire découvrir qu’outre-Quiévrain - les aficionados de Dany Boon diraient plus simplement en Belgique - des gens très ordinaires - on pourrait aller jusqu’à les qualifier de sous-prolétaires - osent des pratiques que l’on croyait réservées aux cerveaux compliqués de la haute bourgeoisie intellectuelle.
Il ne sera pas ici question de Maîtresses sophistiquées mais de mémères dont les guêpières ont la taille de sacs de charbon, s’activant sur de clients soumis en tricots de corps. Bref, si l’on est capable de supporter quelques propos scatologiques au-delà du pipi-caca ou plutôt - comme ses grosses dames disent - au delà du champagne-caviar, on devrait convenir que tout cela n’est pas banal et aussi amusant qu’un numéro du magazine belge "StripTease" qu’on aurait précautionneusement classé X.
Sans être prosélyte, "D/s" donne de la domination une vision plutôt positive du genre connu "y a pas de mal à se faire du mal". Car, paradoxalement, on lit dans ces pratiques une immense soif d’amour, une envie irrépressible de partager cet amour à coups de brûlures de cigarettes et de talons aiguilles enfoncés dans les chairs. Elles le répètent, nos maîtresses belges sans âge et obèses, elles font ça par amour et surtout pas pour de l’argent. Elles sont presque tristes pour la majorité de l’humanité qui s’en tient à des "relations vanille", c’est-à-dire où n’interviennent pas de pratiques de domination/soumission.
Au "Brady" où le film va sortir, il est prévu un certain nombre de débats avec des théoriciens ou des praticiens de ces jeux sexuels. On aura alors une confrontation assez intéressante entre un film qui fait assez bien le tour de la question sans la rendre fumeuse et des spécialistes qui ont souvent tendance à faire de leur perversion favorite l’alpha et l’oméga de la métaphysique.
Quoi qu’il en soit, le travail de Jacques Richard et de Maîtresse Léïa a le mérite de ne jamais être malsain. On appréciera le clou de "D/s", le saucissonnage en suspension opéré avec grand talent par Maîtresse Leïa sur l’un de ses "patients" déguisé en femme. Et puis, une fois quitté le donjon où se déroulent ces pas très catholiques exhibitions, on sera peut-être animé de plus de tolérance pour cette sexualité minoritaire quand elle est évidemment pratiquée entre adultes consentants et pas douillets pour un sou.. |