Toujours les aubes noires d'Explosions in the sky. On serait ravi de retrouver intactes en 2011 la beauté et les fureurs de cette musique, ses déflagrations et ses cieux tourmentés ; on en serait ravi, tant il semble que rien n'ait changé, quatre années déjà depuis All of a sudden, I miss everyone (2007), dernier album avant un silence qui put sembler long ; mais entre temps, on aura patienté en écoutant tant de formations qui ont appris à sonner comme Explosions in the sky que l'on aura finalement perdu l'impatience elle-même.
On ne suggèrera au chaland dubitatif que d'aller écouter le généreux They'll come, they'll come que sortirent en 2007 les jeunes suédois d'Immanu El pour se rendre compte de l'existence de telles clonneries, avec en prime un peu de chant par moment.
Il serait temps de se rendre compte que la formule, à défaut de péremption, a tout au moins perdu au fil des années un peu de sa valeur (ne serait-ce que marchande) dans une certaine vulgarisation ? Soit. Et cela justifierait bien que l'on n'ait plus attendu Explosions in the sky – dont les plus précoces et enthousiastes adorateurs avaient par ailleurs tendance à penser que leurs meilleurs albums étaient derrière eux, ces premiers albums avec lesquels, fiévreux et mal dégrossis, certains avaient découvert au début des années zéro qu'il existait entre Godspeed You Black Emperor et Mogwai une troisième voie.
C'est donc en adulte, les yeux décillés et les oreilles déjà expérimentées que l'on se doit d'aborder Take care, take care, take care. Qu'en ressort-il alors ? Qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil. Mais que ce soleil est toujours délicieux.
Pour le dire autrement : Explosions in the sky a réussi un album très banalement excellent, rigoureusement dans la ligne de ses précédentes productions. Pas d'invention, pas d'innovation, aucune révolution, même si l'on cherche ci ou là à nous faire croire que tout ici est nouveau. Tout ici, au contraire, a déjà été entendu, chez Explosions in the sky ou ses suiveurs. Mais, de la constance admirable au méprisable manque d'inspiration, il n'y a certainement qu'affaire de plume.
Take care, take care, take care se révèle ainsi comme le parfait album innessentiel d'une formation de valeur : gratuit plutôt qu'inutile, et qui n'aura pas le prestige d'être l'album râté, la mauvaise passe, le fond de la piscine. Le bon album de plus, que l'on n'écoutera pas souvent, mais jamais sans aucun plaisir ; dont on ne gardera certainement que peu de souvenirs, mais dont on ne se passerait que sottement dans sa discothèque. |