Quand on m'a proposé d'aller chez EMI France pour écouter en avant-première le nouveau projet de Danger Mouse, je n'étais pas vraiment persuadé d'en avoir envie... J'ai tout de même fait quelques recherches sur internet et je découvre que Jack White et Norah Jones ont posé leurs voix sur deux titres déjà disponibles (et chroniqués la semaine dernière dans la rubrique EP et single). Je n'ai jamais été un grand fan de jazz, mais depuis que j'ai vu Norah Jones dans le film My Blueberry Nights et que j'ai entendu "Virginia moon", son duo avec les Foo Fighters, je suis tombé amoureux d'elle. Pas la peine de lire toute mes chroniques sur Froggy's Delight pour savoir que je suis un fan inconditionnel de tout ce que peut faire, toucher ou penser Jack White. Donc puisque ces deux là participaient au projet, je ne pouvais qu'aller écouter ce disque...
On connaît bien Danger Mouse et ses différentes activités (DJ et producteur New-Yorkais, membre de Gnarls Barkley, producteur du Demon days de Gorillaz entre autres). Par contre, on connaît moins bien Daniele Luppi, compositeur italien qui a bossé pour le cinéma (Sex and the City) et fait les arrangements pour Gnarls Barkley. Les deux hommes passionnés de bande originale classique du cinéma italien ont décidé de bosser sur un projet commun. Ils se sont rendu à Rome et ont réuni les musiciens qui avaient joué, à l'époque, la musique des films comme Le Bon, la Brute et le Truand ou Il était une fois dans l'ouest, dans le studio mythique d'Ennio Morricone. Tout a été enregistré en analogique, à l'ancienne. Ils ont ensuite cherché un homme et une femme pour chanter trois titres chacun. C'est donc Jack White et Norah Jones qui ont été retenus.
"Theme of Rome" ouvre l'album tout en rythme simple et basique. Il n'y a pas de paroles, mais des chœurs gémissants. Ce premier titre instrumental est déjà très Ennio Morriconesque. Sur "The Rose with a broken neck", Jack White chante sur une guitare très funk. Une voix féminine complète avec douceur son timbre rock. "Victor's Theme I" est un morceau très court qui ressemble à une comptine échappée d'une boîte à musique.
Sur "Season's Trees", Norah Jones chante d'une voix suave et lascive. Une basse ronde est en premier plan avec des nappes de violons sur un fond de guitare et de pédale wah wah. Avec "Bella's Theme I", on a encore du violon et des chœurs qui mélangent une musique orchestrale toute en ampleur, avec des voix qui se rapprochent de l'ambiance des chants grégoriens. Des touches de glockenspiel viennent se superposer à l'ensemble avec subtilité.
"Roman Blue" fait penser à la B.O. d'un James Bond avec encore ses chants sans paroles qui font monter l'intensité du titre. Avec "Two against one", Jack White chante sur un clavecin. Cela se rapproche plus de ce que White fait avec les Raconteurs que les Stripes ou les Dead Weather. "The gambling priest" voit des chœurs masculins se battre en duel avec une guitare sur fond de violon. Comme sur les autres morceaux de cet album, le duo basse/batterie est ultra efficace, ce sont les poumons qui font respirer l'ensemble.
"The world" est une interlude très courte avant "Black" chanté par Norah Jones. Sa voix est très en avant sur les couplets et un peu plus douce sur les refrains. J'avais jamais pris conscience que Norah Jones pouvait avoir une voix si chaleureuse. Elle a la profondeur d'une vieille chanteuse soul et la sensualité d'une pin-up. "The matador has fallen" a une ambiance 70's avec un synthé qui exprime une urgence calme (oui, c'est possible).
"Victor's Theme II" fait penser à Ray Manzarek des Doors dans les envolées héroïques des claviers. Un piano et une guitare sont en boucle au premier plan avant l'arrivée de la voix de Norah Jones. C'est le titre le plus pop de l'album. "Bella's theme II" fait toujours penser aux B.O. des années 60/70, mais plutôt à la musique d'un film d'amour que d'un western. "The World" avec Jack White clôture l'album. Il y a encore une voix féminine qui chante avec lui. C'est plutôt bon et fait penser à Morricone ultra héroïque.
Rome, le projet western spaghetti réunissant Jack White et Norah Jones sous la direction de Danger Mouse et Daniele Luppi se révèle être une parfaite réussite. Des instrumentaux épiques, et juste assez de titres avec du chant pour ne pas tomber dans de la B.O. un peu chiante. La barre a été placée assez haute mais le défi est réussi. Il parait qu'ils vont faire 3 concerts exceptionnels (avec ou sans les musiciens italiens de 70 ans... Je ne sais pas !), un à Los Angeles, un à Londres et j'espère qu'ils en feront un à Paris. |