Réalisé par Stéphane Mercurio. France. Documentaire. 1h32. Sortie cinéma 13 octobre 2010. Avec Siné.
Le DVD est disponible dans les bacs depuis les premiers jours d’avril, c'est-à-dire au bon moment. Celui de courir acheter "Mourir ? Plutôt crever !" le film de Stéphane Mercurio.
Pour mille et une raisons, je n’avais pas pu voir, lors de sa sortie, le film consacré à Siné. Erreur réparée en glissant la galette dans le lecteur.
Cinéma.
Un documentaire comme il en existe peu dans le paysage aujourd’hui formaté. Un film frais rappelant, et oui, de par certains côtés libertaires l’An 01 de Doillon. Ici, le film de Stéphane Mercurio laisse libre cours à sa caméra libertaire. Elle vit sa vie avec son copain Siné qui nous parle de lui, de son procès avec Charlie Hebdo dont il a été évincé, de la naissance de Siné Hebdo et de la mort. C’est l’étrangeté du documentaire. Tout tourne autour de la mort. En ouverture et à la fermeture du film. Pendant aussi, parce que notre homme à 80 ans et malgré sa force de vie, il encombre le film de souvenirs.
Mais point de larmes voulez-vous. Le film n’est pas sur l’écran pour cela. Laissons la nostalgie à la radio et pointons le doigt sur la réalité du film, le portrait d’un rebelle. Siné le dessinateur, est un mohican de la tribu "des emmerdeurs" . Un de ces derniers hommes libres, d’oser, sans esprit mercantile d’affronter, certains diront escalader, la connerie humaine.
Sûr, vous pouvez l’être, si il n’en reste qu’un : Siné sera celui qui mettra le coup de pied au cul à qui il faut (à vous de voir).
La mort, - revoilà la faucheuse -, reste irrévérencieuse face au vivant moribond. On est parfois plus vivant mort et le scalp de l’hypocrisie en main, Siné nous le démontre par sa démarche au cimetière du Père Lachaise, là où il a réservé, pour lui et un certains d’amis anarchistes, un caveau.
Siné est un dessinateur libre.
Il a payé cher, ce coup de crayon. Un compagnon de route l’a poignardé dans le dos au nom d’un dessin qui se veut l’antisémite. Val, alors le patron de Charlie Hebdo et aujourd’hui Big Boss de France Inter, le vire à la manière d’un seigneur féodal avec le silence" inquiétant" de quelques piliers du support satirique.
Un procès que Siné va gagner.
Mais la blessure est là, profonde. C’est le basculement du film, ce moment où, rejoint par Guy Bedos tout le monde se retrouve au tribunal. Alors la caméra, cette fouineuse, capte un étrange discours de la part de l’avocat de la LICRA (Ligue Internationale contre le Racisme et l’Antisémitisme) qui prône, en message à peine voilé (si je puis dire), le communautarisme comme solution démocratique… Il faut entendre ces étranges paroles pour comprendre l’importance d’un homme comme Siné.
Troublantes ! Elles le sont dans la bouche de l’avocat d’une association contre le racisme… Étrange ce sentiment de mal être devant de telles affirmations, même si, naturellement, cela n’enlève rien à la répugnance des insultes encore aujourd’hui véhiculées envers nombre de compatriotes issus de l’émigration. N’empêche !
Cette courte séquence donne brusquement un autre ton au film dans son ensemble… Loin de paraître injurieux, Siné est ouvert, tolérant.
Le cinéma documentaire a la force d’offrir des moments captés qui remettent parfois les pendules à l’heure… Le film de Stéphane Mercurio doit être vu pour tout cela et plus encore. Comment oublier les réunions de travail pour le lancement de "Siné Hebdo" ? Impossible. La vieille garde toujours présente, des nouveaux également, un bouillonnement qui fait chaud au cœur, une soupe populaire à laquelle on voudrait goutter une fois encore. Pas de problème…
Il suffit dans les moments de bourdon, de glisser la galette dans le lecteur DVD et voir la tronche de Siné, heureux comme un "Pape" signant des exemplaires à la pelle de Siné Hebdo, pour vous dire que tout est encore possible. |