Comédie écrite et mise en scène de Michelle Brûlé, avec
Claire Chérel, Bruno La Brasca, Diana Lazslo, Edith Monteil, Paul Spera et Anaïs Tobelem.
A l'instar de son bourgeois gentilhomme qui faisait de la prose sans le savoir, Molière faisait-il de la psychanalyse sauvage avant l'heure ?
Assurément la réponse est affirmative pour Michelle Brûlé qui, à partir de l'oeuvre de Molière soumise à la grille d'interprétation de papa Freud, a écrit une partition burlesque qui use à plusieurs niveaux, et ce de manière aussi réussie que jubilatoire, pertinente et impertinente, de l'hybridation.
En effet, "Molière sur le divan" résulte d'un montage de scènes, elle a pioché dans sept comédies, dont "L'avare", "Le misanthrope" et "Le malade imaginaire", pour ne citer que les plus connues, d'une fusion de leurs caractères communs les plus "symptomatiques" et d'un mélange des genres de l'onirisme au réalisme psychologique pour créer une "comédie monstre" en ce qu'elle met en scène une famille de monstres névrotiques dont les goûts vestimentaires évoquent ceux de la famille Adams.
Composée du pater familias, mâle dominant pervers à tendance masochiste, autoritaire et hypocondriaque, de la belle-mère narcissique et dominatrice, de la tante coprolalique, de la fille hystérique et du fils dépressif, elle constitue une famille névrotique idéale pour l'expérimentation, la démonstration et, peut-être, la guérison menées par Toinette, une soubrette-analyste ayant pour prénom celui de la servante du malade imaginaire et figure moliéresque emblématique du bon sens et de la raison, qui connait son "Totem et Tabou" sur le bout de sa langue bien pendue.
Comme Molière a pris le parti d'en rire, Michelle Brûlé reste fidèle à la farce mais celle-ci se teinte de blanc, noir et de rouge comme le podium central qui fait office de lit, de table et de cercueil et les panneaux blancs qui structurent l'espace scénique servent à de spectrales et fanstamagoriques jeux d'ombres.
Les scènes revues à l'aune de la sexualité, du refoulement, de la frustration et du fantasme, dispensées par un sextet de comédiens époustouflants, prennent une coloration pour le moins nouvelle, divertissante et roborative. La mise en scène de Michelle Brûlé, qui est également comédienne, fait la part belle au jeu d'acteur et elle a bien raison compte tenu de l'épatante distribution fregoli en l'espèce réunie et appartenant, avec elle, à la Compagnie Malomains.
Alors, et par ordre alphabétique, Claire Chérel, pétulante et diabolique maîtresse de cérémonie, Bruno La Brasca parfait père épouvantable, Diana Lazslo complètement déjantée en fille-poupée, Edith Monteil superbe belle-mère dominatrice qui revisite le personnage de Célimène, Paul Spera pathétique à souhait dans le rôle du fils et du misanthrope violent et, cerise sur le gâteau, Anaïs Tobelem, fracassante dans le rôle de la tante atteinte du syndrome de Gilles de la Tourette dont chaque apparition est un régal. |