Les débordements sont autorisés, tout comme les coups de canons. L’abordage d’un trois-mâts ne va pas être aisé, les côtes sont escarpées. Il faudra "en avoir". Les tripes à l’air, sabre au clair, les coups de canons, les hurlements pour le courage.
C’est que l’île ne sera pas simple à aborder. Les pièges sont partout ; même si les coursives semblent calmes, la tempête n’est pas loin, elle vogue entre les cases des flibustiers du crayon, les pirates de la planche à dessin. La mémoire de la flibuste est aujourd’hui affaire d’artistes. L’imaginaire se fait BD.
"L'Île aux Pirates" vient d’ouvrir ses portes et regorge de trésors. Soyez de ceux qui pensent que le voyage forme les bons flibustiers, de ceux qui pensent que l’aventure ne se termine pas là où elle a commencé, c'est-à-dire au bord des vagues. Même là, l’imaginaire doit vous transporter. L'horizon a été dessiné pour cela, imaginer l’invisible.
Rendez-vous à Angoulême, à la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image, pour découvrir un été pictural. Un univers où le soleil ne se couche jamais. L’empire des 7 mers sur lesquelles la flibuste et autres pirates régnèrent pendant trois siècles. L’aventure humaine et sociale au bout de la mine dure, entre réalisme et humour, ligne claire et aplat. Dans un noir et blanc cinématographique aux couleurs technicolor. Tout un monde que l’imaginaire rappelle à notre bon souvenir.
On vous parle d’un temps où Morgan, Long John Silver, Barbe Noire, sont les héros libertaires d’un monde déjà sclérosé. La liberté est sauvage (comment pourrait-il en être autrement ?) Et, comme toute liberté, elle pèse le prix de la douleur. De ceux, trop protégés dans leurs conventions sociales, qui ont vendu leur âme au diable pour rester douillettement peinards. La mort est au bout de la liberté.
Regardez bien les planches de Jean-Michel Charlier et Victor Hubidon, celles de Will Eisner ou encore de Cazanave et Marijac… L’honneur de la vie est au bout du crayon. Ce n’est pas un hasard si elles ouvrent l’expo qui vous offre 300m2 d’absolue liberté. Peut-être, d’ailleurs, l’imaginaire peut-il remettre en question quelques conformismes ?
Restez au centre du dispositif, vous aurez l’impression de vous trouver sur le pont du "Black Pearl" et de scruter les vastes horizons qui ne demandent qu’à être abordés. Vous découvrirez alors les planches d’Hermann, Christophe Blain, Jean-Luc Masbou ou encore André Juillard, pour ne citer que quelques Frères de la Côte … D’autres, nombreux, vous attendent.
Soyez fous, puisqu’il faut l’être lorsque l’île déserte vous tend les bras, vous offre un trésor à découvrir ou encore une prison où la mort est presque assurée. Mais, ici, c’est un havre que proposent aux plus jeunes les organisateurs ; à eux de découvrir les coffres remplis de BD. Un trésor que nombre de collectionneurs envient.
Il faut parcourir le plaisir et déguster les illustrations qui ont servi la littérature. Comment oublier Hugo Pratt et son adaptation de "L'île au trésor" ? Impossible. Comment oublier les femmes ? Elles aussi portent le pantalon et manient le sabre avec dextérité. Le monde de la flibuste a toujours été le lieu d'une longue confrontation entre femmes et hommes. Femmes libres à l'abordage (??), sur un pont ou sur l'île de la Tortue. Elles viennent signer leur indépendance en se la jouant masculines ou terriblement troublantes… Le monde n’est pas fait que d’hommes !
A découvrir, une pépite, "Hawks of the seas" de Will Eisner, une des premières séries flibustières américaines (1938). Quand on vous dit que cela regorge de trésors !
Et la programmation des films sur la flibustes : là, douze films à découvrir dont le "Pirates" de Roman Polanski, trop rare. Mais arrêtons là, voulez-vous, un générique loin d’être complet. Il faut aussi, moussaillons, que vous en soyez…
Alors à L’ABORDAGE. Vous avez jusqu’au 2 octobre 2011. |