Monologue dramatique d’après Armand de Bourbon, mise en scène de Gabriel Debray, dit par Vincent Viotti.
Mécène de Molière et libertin à la pratique religieuse dilettante bien que formé chez les Jésuites et destiné à l'état ecclésiastique, Armand de Bourbon, Prince de Conti, fils du Prince de Condé, connaît à sa maturité, parallélement aux affres de la syphilis, l'effet de la grâce divine.
Les rigueurs intégristes de la foi retrouvée l'amènent à réparer pécuniairement les exactions commises sous ses ordres lors de la Fronde et à écrire un "Traité de la Comédie et des spectacles selon la tradition de l'Eglise, tirés des Conciles et des Saints pères" dans lequel il condamne avec virulence le théâtre qu'il assimile à l'église du diable en ce qu'il exacerbe les passions qui détournent les hommes de Dieu qui seul doit régner dans leur coeur.
Voilà un revirement spectaculaire dont les virulents développements consacrés aux méfaits de la représentation théâtrale, l'analyse de cette dernière reposant par ailleurs sur de pertinentes prémisses encore d'actualité trois siècles après sous la plume de Brecht entre autres, ont interpellé Gabriel Debray et Vincent Viotti et leur ont inspiré ce montage d'extraits du fameux traité sous forme d'un monologue aussi véhément qu'illuminé.
Tourmenté et souffrant, le frais émoulu dévot cloué dans son lit devient un prédicateur qui manie la censure et l'anathème avec la fureur d'un inquisiteur. Mais comme souvent, la frontière est ténue entre le vice et la vertu et, obsédé par la prose de Molière, c'est avec la volupté suspecte du censeur qu'il joue des scènes de "L'école des femmes", de "Tartuffe" et de "Dom Juan ou le festin de pierre" qui alimentent sa démonstration.
"L'insomnie du Prince de Conti" est mise en scène avec rigueur et justesse par Gabriel Debray qui soutient le verbe fanatique du bonhomme magistralement incarné par Vincent Viotti, fascinant, un grand comédien qui dispose des moyens nécessaires, de la maîtrise du souffle à l'art de la profération, pour incarner cette figure janusienne à la fois monstrueuse et terriblement pathétique. |