Réalisé
par Peter Mullan. France, Royaume-Uni, Italie. 2011.
Drame. Avec Conor McCarron, Gregg Forrest et Joe Sula.
Souvenez-vous, lorsque Peter Mullan réalise The Magdalene Sisters en 2002, il s'attaque à ces couvents irlandais qui, dès le XIXème siècle recueillaient de jeunes filles indésirables, "bannies" de la société sous pretexte qu'elles étaient provocatrices ou pire, s'étaient faites violer, qu'on les considérait comme des putains, sous le consentement familial. Certaines de ces filles terminaient leur vies dans ces "prisons", travaillant comme des chiennes pour la solde de l'église, malmenées physiquement pour couronner le tout. Inutile de vous dire que Mullan s'est adjugé les foudres des institutions catholiques, en particulier le vatican, attaque à laquelle le Lion d'Or reçu pour son film sera la meilleur des réponses.
Ce film choc n'était pas qu'un pamphlet réac vis-à-vis de l'église, il dévoilait surtout une superbe photo, des plans marquants, une réalisation brillante.
Avec NEDS, Non Educated DelinquantS, Peter Mullan continue de se pencher sur les fêlures de la société au Royaume Uni, dans un milieu prolo à la Ken Loach (qui lui avait donné un superbe rôle d'alcoolique dans My Name is Joe). Il va donc s'immerger dans la déchéance d'une certaine jeunesse populaire (chez Mullan, il y a moins de bla bla et moins de nervosité dans la caméra). Mais quelle jeunesse ! Grosso modo, il s'agit de la sienne : Peter Mullan se lance dans la déliquance des quartiers de Glasgow au début des années 70, qu'il a lui-même côtoyés.
Un jeune homme, brillantissime à l'école, découvre rapidement la méfiance des profs à son égard au collège (car son frère est un voyou) et au sein d'un environnement familial désastreux, sombre dans la violence des clans, pour ne pas passer pour un bouffon et s'affirmer.
Sur le papelard, ça fait sujet larmoyant (à la Ken Loach) mais pour mieux rendre son sujet stupéfiant, comme dans The Magdalene Sisters, sa narration est solide, de belles idées de mise en scène (lorsque l'ado, passablement bourré, voit arriver sur lui le Christ pour le prendre dans ses bras alors qu'il lui fout une râclée), quelques scènes d'humour efficaces (comme la baston entre deux clans à coup de couteau accompagnée d'une musique guillerette ou les répliques tonitruantes du gamin - d'un calme olympien - à son prof) et surtout l'ado qui interprète le rôle phare, - Conor McCarron, retenez ce nom - sorte de gros nounours, tout bonnement impressionnant, sage comme tout au début du film, et qui glisse dans la provocation pour devenir juste terrifiant à la fin.
Ce gars crève l'écran et nous scotche devant.
Le film est à l'image d'une cocotte minute qui fristouille gentillement pour faire sauter la soupape dans la dernière heure de cuisson.
Mullan mijote son affaire, et il nous cuisine bien pendant deux heures de temps. Allez, osons, le film aurait pu ne pas être loin d'un American History X dans la montée progressive de cette violence urbaine et gratuite, jusqu'à ne plus être contrôlable.
Quelques scènes caricaturales (celles du père alcoolique interprétées par Mullan, trop excessives, n'apportant pas grand chose au récit) ou symboliques (la fin) l'en empêche, venant ternir quelque peu le tableau, qui reste tout de même une belle peinture de cette époque sombre de Glasgow. |