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Théâtrede la Bastille  (Paris)  février 2012

Spectacle écrit et mis en scène Pierre Meunier, avec François Chattot, Pierre Meunier et Pierre-Yves Chapalain.

Qu’y a-t-il au fond des gorges ? Que peut-il en sortir ? Qu’est-ce qui ne peut s’en extraire qu’avec du bruit et de la fureur ? Est-ce que les mots viennent du silence ? Pourquoi en sortent-ils au lieu de rester tapis dans les corps ? Qu’est-ce que parler veut bien dire ?

Trois hommes perdus dans un océan de chambres à air, de structures qui se gonflent et se dégonflent, dépoitraillés ou en costumes-cravatés, vont se risquer à la parole, aux cris, aux chants, vont prendre ou perdre du souffle pour faire le tour de toutes ces questions et de beaucoup d’autres.

Trois qui sont quatre comme les Mousquetaires, puisqu’un quatrième compère, silencieux, range et dérange ce magma de chambres à air aléatoires, ce bric-à-brac de machines bizarres Son silence est lourd, mais aussi léger comme le mot final qu’il prononcera, qu’il définira pour qu’un ordre poétique succède à ce chaos de sketchs politiques ou didactiques.

Succession de saynètes surréalistes, parade de clowns néo-felliniens, épreuves dignes des Branquignols d’antan; "du fond des gorges" refuse la majuscule et s’installe dans la "création collective" où tout est possible, même la maîtrise d’un espace scénique encombré, même les performances d’acteurs suspendus dans les airs ou pratiquant le discours en équilibre économique instable.

Méli-mélo, patchwork, moments de grâce ou de total n’importe quoi, la proposition théâtrale orchestrée par Pierre Meunier et ses trois complices (Pierre-Yves Chapalain, François Chattot et Frédéric Kunze) déroule une furia qui pourra laisser perplexe mais jamais indifférent.

S’inspirant d’Ossip Mandelstam, Pierre Meunier affirme que la poésie est là pour nous réveiller, nous secouer en plein milieu du mot. C’est tout son propos dans "du fond des gorges". On pourra le trouver délectable ou le juger insipide, mais force est de reconnaître que ce théâtre a su s’abstraire du théorique pour se transformer en spectacle très concret, généreux et physique.

 

Philippe Person         
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