C'est l'histoire d'une rencontre improbable... entre l'univers d'un groupe de musique électronique, futuriste, et celui d'un réalisateur, inspiré par Jules Verne ou H.G. Wells. Jusque là, aucune surprise : la frontière semble invisible. Sauf que – si peu – plus d'un siècle les sépare. Pourtant, Le voyage dans la lune est ce projet fou qui unit aujourd'hui Air et George Méliès.
J'imagine. Un jour, des fous de la restauration se lancent le défi de restaurer Méliès. Ils ne savent pas encore que quelques années pleines de pérégrinations les attendent. Courant le Graal, ils parviennent à retrouver à Barcelone une bobine : le fameux court-métrage, le seul exemplaire colorié par Méliès lui-même, sérieusement endommagé. Ils s'acharnent. 13 375 images de fragments recollés plus tard, le film éclot enfin en 2011.
Reste la bande-son. A l'époque, des musiciens accompagnent à façon le film dans les salles. Soit le choix se porte sur les musiques de l'époque. Soit... ne s'agit-il pas d'un film de science-fiction ? Ces chers restaurateurs ont déjà leur idée. Qui mieux placé que le fameux duo français : Air ? Les versaillais Jean-Benoît Dunckel et de Nicolas Godin ne sont-ils pas les auteurs du fameux Moon safari ? En vérité, Le voyage dans la lune, ils ont ça dans la peau depuis longtemps. Tels les musiciens de l'époque, devant les quatorze minutes du film, leurs créativités se mêlent et fusionnent. Le résultat est étonnant. Poussée par la curiosité, je regarde cette scène du voyage. La découverte de l'astre s'accompagne d'un déferlement de notes au piano, si fragiles. Je suis prise d'un émerveillement enfantin. Et lorsque la navette atterrit et se plante littéralement dans l’œil de la lune, des larmes rouges explosent. La fragilité bascule vers la mélancolie. Je suis touchée.
Un an plus tard, la couverture rend hommage à cette lune éborgnée. Après avoir délaissé certains passages, utilisé d'autres, composé de nouveaux, Air signe ce nouvel album : Le voyage dans la lune. En l'écoutant, j'ai cette sensation étrange de déjà-vu. J'entre dans un univers connu, si propre au duo. Des versions instrumentales aux passages chantés, les recettes utilisées n'étonnent pas. Mais l'ensemble est si efficace : évasif, planant, gai, fragile, touchant. Les onze titres laissent un goût de trop peu : une trentaine de minutes. Peut-être suffisant au risque de créer de la redondance. Sur les images, Air accomplit avec succès ce pari fou de donner le souffle de l'immortalité à une pièce maîtresse du cinéma.
Une rencontre à jamais éternelle... Amour, Imagination et Rêve...
- La fin - |