Réalisé par Brian Robbins. Etats-Unis. Comédie. 1h310. (Sortie 16 mai 2012). Avec Eddie Murphy, Clif Curtis, Clark Dulce, Ariel Felix et Alain Chabat
Dans quel film Alain Chabat s’appelle-t-il Christian Léger de la Touffe ?
Dans quelques années, voire quelques mois, vous, lecteurs de Froggy’s Delight, vous serez les seuls à pouvoir répondre à cette question fondamentale qui devrait permettre de gagner une somme folle à un quelconque quizz de TF1.
Donc, même si "Mille Mots" ne restera peut-être pas dans vos mémoires, il est important d’aller voir ce film dans lequel Eddie Murphy poursuit vaille que vaille, avec un allant toujours renouvelé, une carrière commencée depuis plusieurs décennies...
À l’origine, cette comédie devait être un film français et c’est Chabat qui devait s’en charger des deux côtés de la caméra. Sans doute en plein houba houba avec Jamel et le Marsupilami, il a accepté que ce pur divertissement à la française devienne un produit transatlantique, dont il est le co-producteur avec, parmi d’autres, Nicholas Cage !
Quand on écrit "pur divertissement à la française", cela signifie que "Mille Mots" ne repose pas, à l’instar des "vraies comédies" américaines sur des situations et des personnages, mais sur une spécialité franchouillarde, souvent pour le pire que le meilleur : le quiproquo. Et sur une variante particulière du quiproquo : la méprise.
Acteur volubile, personne ne l’ignore, Eddie Murphy ici ne peut pas parler et doit s’exprimer difficilement par gestes. Du coup, quand il dit A , tout le monde pense B, quand il aime, on croit qu’il déteste, etc....
Chabat, le papa putatif de "Mille Mots", a dû lire dans sa jeunesse "La Peau de Chagrin" de Balzac puisque le destin de Murphy est lié à celui d’un arbre poussé miraculeusement dans le jardin de sa belle maison : dès qu’il parle, une feuille tombe et quand les mille feuilles de l’arbre magique seront par terre, Eddie mourra...
Il a dû aussi réviser tout son De Funès puisque c’est irrésistiblement à notre Fufu national qu’Eddie Murphy fait penser. En agent littéraire prêt à tout pour faire signer un contrat par un gourou qui aurait pu être joué en France par Dany Brillant, il se démène contre l’univers entier, utilise toute la palette grimacière de son visage étonnamment mobile et n’a rien perdu de sa sympathie rayonnante.
Avec cet argument léger comme un tronc d’arbre, on n’aura évidemment pas au final quelque chose qui se rapproche d’un Lubitsch. Cependant, on sera devant quelqu’un qui est désormais aussi sous-estimé que Jerry Lewis hier et que Jim Carrey aujourd’hui.
Et pourtant, comme Carrey, Eddie Murphy est un grand acteur comique, c’est-à-dire mieux qu’un acteur tout court, et surtout quelqu’un qui en fait beaucoup mais jamais trop.
Que ceux qui le suivaient dans leur jeunesse n’aient pas honte de continuer à venir lui rendre hommage dans les rarissimes salles qui passent ses films récents.
N’attendez pas que des cinéphiles de l’an 2030 le réhabilite pour rire avec Eddie Murphy... Et n’oubliez pas qu’Alain Chabat incarne dans "Mille mots" Christian Léger de la Touffe, son meilleur rôle puisque le plus bref... |