Juste la fin du monde
Comédie dramatique de Jean-Luc Lagarce, mise en scène de Mikael Chirinian, avec Bertrand Combe, Evelyne Dandry, Ludivine de Chastenet, Benjamin Gauthier et Anna Mihalcea.
Pour "Mises en Capsules" festival de formes courtes de création organisé par le Ciné 13 Théâtre sous la direction de Benjamin Bellecour, Mikael Chirinian a choisi de présenter une version tronquée des deux tiers d'un texte d'un auteur connu qui est régulièrement à l'affiche.
En l'occurrence, "Juste la fin du monde" de Jean-Luc Lagarce qui peut s'analyser comme une déclinaison du retour - raté - du fils prodigue dans laquelle Louis, le fils qui est parti depuis longtemps, l’absent qui reste cependant au cœur de la famille, revient un jour pour annoncer sa mort prochaine.
Réduire à trente minutes un opus de quatre-vint dix est un entreprise hasardeuse dans la mesure où, malmenant la dramaturgie initiale, elle court le risque majeur d'affaiblir la compréhension de l'intrigue ou de la situation.
Grâce au parti pris du registre du théâtre vivant, montrant l'homme à l'homme de manière juste et humaniste, une distribution épatante et le procédé de l’arrêt sur image, qui simultanément colle avec la structure de la pièce et la représentation du souvenir dans laquelle le personnage central intervient également en aparté, Mikael Chirinian tire son épingle du jeu.
Tout comme Benjamin Gauthier, Louis le narrateur-témoin, les quatre autres comédiens traduisent avec justesse et sensibilité la réalité émotionnelle de personnages prisonniers des mots qui ratent souvent le coche de la verbalisation des affects.
Evelyne Dandry, la mère désemparée et ancrée dans un passé heureux, Bertrand Combe le frère pris en étau entre les amertumes du passé et un amour fraternel déçu, Ludivine de Chastenet excellente dans le rôle délicat de la belle-soeur, qui rend bien compte à la fois de son statut inconfortable de pièce rapporté et du fait qu’elle est peut-être l’élément qui va catalyser les retrouvailles et Anna Mihalcea comédienne au beau potentiel dans le rôle de la jeune soeur.
Le Procès de Patrick Bateman
Comédie écrite et mise en scène par Patrick Piard, avec Yves Jégo, Victor Pontecorvo, Sabrina Marchese, Anna Mihalcea, Cédric Moreau, Alice David, Patrick Piard, Eugénie Ravon, Aurélien Rondeau et Daniel Kramer.
Bonne idée que s'inspirer du best-seller "American Psycho" de Bret Easton Ellis racontant le périple meurtrier d'un trader psychopathe pour concocter une comédie trash.
Mais, pêché de jeunesse, l’entreprise pâtit de la surabondance de thèmes et brasse, de la satire au Grand Guignol, trop de registres pour un format court, de la lourdeur de la scénographie avec de nombreux et laborieux changements à vue qui altère le rythme et de la dispersion mégalomaniaque de Patrick Piard voulant être à l'écriture, à la mise en scène et au jeu dans le rôle du personnage principal.
Résultat : cris et gesticulations pour un spectacle potache qui bénéficierait d'une vraie valeur ajoutée avec une vraie et rigoureuse direction d'acteur.
Carter est un porc
Comédie dramatique de Romain Duquesne, mise en scène de Sébastien Chassagne, avec Romain Duquesne, Jean Pavageau, Angélique Zaïni, Grégoire Baujat et Gaétan Peau.
Jésus, garçonnet roux, déficient mental qui se gave de biscuits Pépito, serait-il le fils d’un Dieu SDF et d‘une truie, engrossée une nuit de beuverie, et adopté par le couple propriétaire de cette dernière ? Tel est l'intrigue jubilatoire à l'insoutenable suspense de "Carter est un porc".
Ecrite par Romain Duquesne, qui a peut-être de l'avenir dans l'écriture du genre de la pseudo-parabole biblique iconoclaste, trash, potache et graveleuse, cette comédie délirante entraîne le public dans un délire totalement assumé aussi bien par l'auteur qui a dû fumer la moquette ou faire une overdose de saucisses barbecue que par le metteur en scène, Sébastien Chassagne, son compagnon de promotion 2010 de l'ESAD, qui s'est sans doute nourri au petit lait de l'hyperréalisme cru et déjanté de Jean-Michel Rabeux et de la Compagnie du Zerep.
Et sur scène, Jean Pavageau, Angélique Zaïni, Gaëtan Peau et Grégoire Baujat s'entendent à merveille comme larrons en foire de foire (au jambon bien évidemment) pour jouer à fond la bouffonnerie. |