Réalisé par Hagar Ben Asher. Israel. Drame. 1h27. (Sortie 11 juillet 2012). Avec Hagar Ben Asher, Ishai Golan et Ichio Avital.
Quand on évoque le cinéma israélien, on pense d'abord à des films à sujet, traitant bien entendu du problème palestinien ou de la difficile cohabitation entre une population fortement occidentalisée aux mœurs libérales et une autre respectant scrupuleusement la religion de Moïse.
La première surprise de "La Femme qui aimait les hommes", le beau film de Hagar Ben Asher, est de ne s'inscrire dans aucune des problématiques habituelles.
Si les protagonistes ne parlaient pas hébreu, on pourrait même imaginer que le film ne se situe pas en Israël. D'autant que l'action se passe à la campagne, une campagne riante photographiée dans une lumière qui rappelle plus les paysages du Nord de l'Europe qu'un pays méditerranéen. Une campagne où il y a des chevaux et pas d'oliveraies...
Et puis, ici, aucune trace de morale judéo-chrétienne. Tamar, le personnage incarné par la réalisatrice, est une femme libre, une mère courage qui s'occupe seule de sa ferme et élève ses deux filles. Elle n'est mue par aucun impératif ayant à voir avec le "Bien" ou le "Mal", mais agit par la seule loi de son désir. Un désir vif et viscéral, mais paradoxalement aussi abstrait que physique.
Face à un village d'hommes - on n'y verra aucune autre femme -, Tamar ne transcende sa solitude que par l'accomplissement de l'acte sexuel, ne combat ses peurs que dans l'érotisme. Comme le cheval qui s'échappe pour se fracasser contre un véhicule, elle paiera cher et cash cette liberté.
Dans une succession de scènes qui peuvent se clore sur elles-mêmes, et qui donnent au film l'aspect d'un patchwork qui ne prend son sens qu'une fois achevé, Hagar Ben Asher produit une œuvre envoûtante mais jamais hermétique dans laquelle la banalité et la répétition des actes les plus simples finissent par prendre sens.
Devant la possibilité d'un "retour à la normale" (le couple), une violence logique se déploiera, matérialisée par une scène finale surprenante, dont on laissera la surprise au spectateur.
Simple, sensible, mystérieux, "La Femme qui aimait les hommes" de Hagar Ben Asher vaut d'abord pour son climat inattendu, sa manière de s'inscrire hors des chemins battus. Il est porté par l'élan de la réalisatrice-comédienne, à la fois sensuelle et lointaine, créant un personnage tragique sans passer par la tragédie.
On n'oubliera pas Tamar, son corps généreux et son visage presque sans sourire, faisant face au monde, faisant face aux hommes.
Un admirable portrait de femme admirable.. |