Il y a dans ce premier album des nordistes de Karavage quelque chose des clairs-obscurs du peintre italien dont ils empruntent le nom. Quelque chose, peut-être aussi, de sa vie, elle-même clairement obscure (c'était, voyez-vous, la Renaissance et tuer un homme, à cette époque-là, se faisait parfois...). Quelque chose, surtout, de cette mythologie du blues : âpre, folle, possédée. La sensualité du bayou, la folie du génie.
Amoureux de lumières (tamisées, voilées, étranglées) et de mots (enfiévrés, contrastés), le quatuor peut rappeler, par l'esprit, d'autres précheurs-rockeurs aux sonorités parfois abrasives : ce beau parleur de Tom Waits, Nick Cave et ses Bad Seeds (plutôt à leurs débuts) ou même son Birthday Party, les français de Jack The Ripper (en moins propre sur soi...). On songe encore, pourquoi pas, aux beugleries de Christophe Bell Oeil, autre peintre-troubadour.
Disque passionné et passionnant, Crieries d'Ars et tambour déploie une énergie importante. On devine, derrière des compositions riches, l'engagement total des musiciens – et, soyons honnêtes, on est soudainement très curieux de pouvoir découvrir tout cela sur scène. Si la voix qui porte tout cela peut surprendre dans les premières secondes par son timbre particulier, sa ferveur lui donne très rapidement une place à part entière dans cet univers poético-sauvage, confirmant surtout que Karavage possède déjà une personnalité affirmée, à la fois très riche et très personnelle.
En bref : l'album est une franche réussite et Karavage fait sans conteste partie des formations françaises les plus prometteuses, sur lesquelles il est important de garder un œil et une oreille. L'album est disponible depuis le 13 juin, en digipack depuis le 1er août et une version CD-livre s'annonce pour l'automne 2012. |