Bertha Pappenheim était une militante féministe allemande de la fin du dix neuvième / début du vingtième siècles. Elle est surtout restée célèbre sous le nom d'Anna O, sous lequel Sigmund Freud et Joseph Breuer s'attachèrent en 1895 à décrire son hystérie – avec la fortune fondatrice que l'on sait, mais aussi une certaine de mystification historique.
Est-ce en clin d’œil à cette double histoire faite de lutte et d'introspection contrariée, d'espoir d'avancée sociale et de souffrances psychiques intimes devenue le cas princeps d'une thérapie controversée que la poète et plasticienne Anne-Olivia Belzidsky a choisi son pseudonyme musicien ? Peut-être. C'est en tout cas une première œuvre riche de cette profondeur, concise mais particulièrement prometteuse, qu'elle propose avec She was a Princess, son tout premier EP.
On songe, au féminin, aux narrations chantées-parlées de Gainsbourg façon L'homme à la tête de chou, aux clairs-obscurs de Charlotte Etc, à la synthèse impossible entre l'évaporation d'une Vanessa Paradis et la sensualité fragile d'une punkette qui aurait des lettres. Les sonorités sont dépouillées mais on y reconnaît aisément la pâte de Marc Collin (Nouvelle Vague), qui orchestre et produit ce joli disque délicat.
Littéraire sans jamais cesser d'être musical, épuré sans être cheap, ambitieux sans être prétentieux, She was a Princess réussit le difficile pari de l'équilibre et de la mesure exacte. Il manque encore probablement à tout cela la longueur qui lui donnerait une profondeur supplémentaire, à moins que ce ne soit, au contraire, le coup de maître d'une titre capable de se tenir debout tout seul, mais l'on est suffisamment conquis pour garder une oreille attentive sur l'avenir du projet. |