Monologue dramatique de Jean-Yves Picq interprété par Noémie Bianco dans une mise en scène de Jean-Marc Avocat.
On a tout dit, on a tout écrit sur "La Callas". Diva lyrique devenue mythe à l'égal de Marilyn Monroe, elle n'a pas fini de faire couler encre et salive pour des générations et des générations.
Dans "Callas", Jean-Yves Picq a décidé de restituer sa parole grâce aux innombrables interviews ou entretiens qu'elle a donnés au cours de sa vie artistique tumultueuse.
Sur la scène, des micros sont posés sur des tables derrière lesquelles sont disposées des chaises : tout est en place pour une conférence de presse. On est vraisemblablement dans le salon d'un aéroport...
Et voilà, Callas qui apparaît et qui s'assoit derrière cette forêt de micros. Callas et non "La Callas". Quelqu'un qui va parler de son art et de sa vie, de sa vie dans son art et de son art dans sa vie.
Callas, toute de noir vêtue, dans une robe fourreau noire qui rend sexy ses formes légèrement alourdies. Callas, les cheveux en arrière dans un chignon. Callas, la bouche gourmande de rouge à lèvres. Callas, les bras gainés dans de longs gants noirs.
Callas, actrice et commentatrice d'elle-même. Voix grave entre fausse assurance et légère colère, accent indéfinissable, présence péremptoire. Callas c'est Noémie Bianco, qui cache sous son personnage écrasant une jeunesse et une fraîcheur émouvantes.
Dans la mise en scène spartiate de Jean-Marc Avocat, elle ne peut compter que sur son visage et sa voix pour être Callas puisqu'elle sera presque toujours assise, encadrée par une haie d'honneur de micros.
L'exercice est délicat : rendre vie à des mots morts dans la langue de bois convenue des interviews, des mots qui coulent sans tenir compte d'une quelconque progression dramatique. Noémie Bianco se déjoue de toutes ses contraintes et se délecte même de la pire des contraintes, celle de jouer avec un faux accent plus italien que grec qui introduit une réticence, une distance avec la possibilité d'incarnation de l'actrice, repoussée vers la tentation de l'imitation.
Et malgré tout ça, envers et contre tout ça, Noémie Bianco propose une Callas crédible, bouillante de contradictions, révoltée par les cabales, mue par le désir puéril et magnifique d'atteindre la perfection, portant haut le verbe pour proclamer sa part de mensonge et de vérité.
Noémie Bianco emporte la conviction. Cette belle jeune femme donne sa jeunesse comme un écrin à une Callas déjà sans âge. Elle se défie des clichés pour dresser un portrait sensible d'une artiste hors norme. On n'oubliera pas sa prestation convaincue et l'on pressent que sa fréquentation quotidienne de la diva devrait marquer sa jeune carrière prometteuse. |