Spectacle musical conçu par Jacques Gay et Raphaëlle Farman, mis en scène par Jacques Gay, Raphaëlle Farman et Jacques Gay, avec Frédérique Varda (ou Clémentine Bourgoin), Raphaëlle Farman, Franck Cassard (ou Jacques Lemaire), Jacques Gay et Fabrice Coccitto (ou Jérôme Boudin-Clauzel).
Morosité de l'automne ? Dernières nouvelles économiques ? Chute d'énergie ? Il est un spectacle, "Attention, maîtres chanteurs !", rue La Bruyère, sur-vitaminé et énergisant, qui comblera les manques.
Une folle troupe s'agite dans le quartier pour arracher des sourires et réveiller des souvenirs.
Le thème, le prétexte ? Une fresque historique grandiose - celle d'une famille d'aristocrates de province - avec de superbes diapositives ringardes, des costume presque authentiques, un "son-et-lumière" en salle. De la Préhistoire à la fin de l'Histoire, le tout en chansons...
Branquignolesque, froufroutant, plein de gags, le spectacle fait appel aux spectateurs, organisant un karaoké géant, chatouillant la mémoire française d'un peuple où tout finit en chanson.
Si le premier tableau évoque une pièce de boulevard en tournée dans une sous-préfecture menacée de fermeture, avec perruque en nylon, valets en gilet rayé, vraiment rayé, et soubrette fardée à plumeau, on comprend très vite que l'on a affaire à de formidables chanteurs professionnels qui donnent tout au public, d'une voix de Bastille ou de Palais-Garnier (dans l'ordre chronologique inversé) drôles, déjantés, cinglés, fous dansants et chantants, invitant, dans leur ronde de infernale, Trénet, Offenbach, Léhar, l'Opéra-Comique et Broadway, sans oublier Mozart, Lopez, les Folies-Méricourt et le ballet du Grand-Théâtre de Tain-L'Hermitage.
Ils baladent leur malle d'osier de tournée à travers les âges. Rien ne leur résiste, ni les calembours, ni les blagues à une balle (celles qui tuent d'un coup) : le pire est sûr, à califourchon sur le meilleur. Quelle vitalité.
La plus belle voix, c'est Clémentine Bourgoin, étonnante, cantatrice de classe, qui, nous vous avons prévenu sur le pire, perdra toutes ses dents (en criant - l'a-t-elle fait ? - vers Raphaëlle Farman : "C'est farman!"). Raphaëlle Farman, c'est l'Hortense Schneider de la troupe: exquise, racée, suprêmement féminine - une plastique de Folie-Bergère - douée , sachant jouer, faire des claquettes et chanter à ravir.
Les messieurs ne sont pas mal non plus : Jean Gay, nature de comique et voix de ténor, roulant des yeux ronds, imitateur, beau quand il veut et ridicule pour nous amuser, auprès d'un Franck Cassard déchaîné, vraie nature d'opérette et d'opéra, cabotinisant pour notre bonheur, irrésistible.
Enfin, au piano, Jérôme Boudin-Clauzel incarne le fils de famille un peu attardé, videur de pots de confiture et inmariable dans l'état, superbe musicien, clown tragique et masqué.
Après "La Diva et le Toréador", leur précédent triomphe, ces "Maitres-chanteurs" sont partis vers la gloire, drôles en ne tombant pas dans les ricanements de la dérision, avec une frénésie et une "furie française" follement jubilatoires. |