Balade Sauvage ou les herbes folk de Jean Elliot Senior Balade Sauvage est le premier album de Jean Elliot Senior autodidacte genre DIY, inspiré et instinctif. Ça oscille entre pop, folk, americana et chanson française. Treize titres qui ont poussé sans voir été plantés volontairement, un enregistrement sur le pouce. Au final, le concept album plie mais ne rompt pas et forme un road movie végétal : l’échappée belle d’une plante verte qui s’ennuie dans un appartement trop gris. Elle rêve d’herbes folles, ne renonce pas à ses illusions, prend ses racines en main et suit le long chemin de l’émancipation.
Je plante la métaphore. Tu n’es pas né au fond d’un magasin sur un étal ? Autodidacte et multi-instrumentiste, on a forcément envie de savoir quelle graine a poussé où ?
Jean Elliot Senior : Non, je suis né par accident en Argentine. Mais je n'en ai aucun souvenir, j'étais trop jeune. Ensuite je revenu en France à 3 ans, puis je suis parti au Mexique, pour revenir définitivement en France. J'ai commencé la musique assez tard, dans mon dortoir d'internat vers 17 ans en grattant la guitare d'un pote. C'était surtout l'envie de monter un groupe qui m'a poussé, d'avoir une bande de potes… Mais ça n'a pas marché, mes potes ont choisi quelqu'un d'autre, il a fallu que j'attende d'initier un projet personnel.
Où es-tu enraciné finalement ? Tu as des attaches ou des amarres rompues ?
Jean Elliot Senior : Je suis exposé plein Est. Pour bien voir le soleil se lever.
En écoutant l’album, on peut avoir la tentation d’y chercher une part d’autobiographie, l’oreille peut confondre le narrateur et l’auteur… d’où vient cet album ? Comment est né ce projet ?
Jean Elliot Senior : Avant de faire cet album j'étais dans un groupe de pop-folk instrumentale qui s'appelait Crëvecoeur, avec lesquels on a joué un peu partout en Europe, mais très peu en France. On faisait une musique instrumentale, un Ennio Morricone, un peu Pascal Comelade, ce genre de musique. Puis le projet est arrivé à son terme et j'ai senti que le temps était venu de faire un projet tout seul. Et puis cet album m'est tombé dessus, tout a été écrit en moins de 15 jours, c'en était même effrayant par moment, je me réveillais, je prenais la guitare ou le piano et ça sortait de moi, rapidement. Tout s'est imposé, le thème, le concept, les paroles. Moi qui n’avais fait que de la musique instrumentale, il a fallu que je m'adapte au format chanson, aux paroles, au chant. Je n'avais jamais chanté avant ni écrit une chanson. J'ai dû apprivoiser tout cela. Surtout que je ne suis pas du tout branché chanson française. Je n'y connais rien et ce n'est pas mon terreau musical.
Un album composé très vite, qui s'est imposé comme une évidence, enregistré "à l'ancienne" et rapidement, c'est là le lien avec ton terreau musical ?
Jean Elliot Senior : Quelque part oui. Je suis un punk, j'ai toujours été un punk. Etre punk, ce n'est pas avoir une crête, se bourrer la gueule et écouter Exploited. Etre punk, c'est faire ce que tu veux, quand tu veux, comme tu veux en attendant rien de personne. Les premiers punks étaient des mecs qui ne savaient pas jouer, mais qui ont pris une guitare, une batterie et qui ont joué quand même. Moi c'est pareil, je n'attends pas. Je ne sais pas lire la musique, je n'ai jamais appris à jouer d'un instrument. J'ai commencé le piano un mois avant de composer Balade Sauvage. Mais je m'en fous, je ne me mets pas de barrière. Je fais les choses à l'émotion, à l'instinct. C'est ça être punk, c'est faire, même si tout le monde te dit que tu ne peux pas ou que ce n'est pas comme ça qu'on fait.
Et puis j'ai été aussi beaucoup marqué par le mouvement Do It Yourself. Faire tout soit même. C'est ce que je fais. J'ai écrit, produit, fais presser les disques. J'ai même inséré moi même les inserts dans les vinyles. Je gère tout. Des groupes comme Minor Threat, Fugazi. C'est quelque part le seul chemin à suivre dans ce business.
Dans Balade Sauvage : tu dis "vivre coûte que coûte", et "liberté si chèrement gagnée", le prix de l’indépendance ça n’a pasde prix ?
Jean Elliot Senior : L'indépendance a un prix. Tu paies cher même. L'indépendance, ça veut dire te mettre des gens à dos, n'en faire qu'à ta tête. Et forcément tu vas froisser des gens, des proches. J'en ai fait qu'à ma tête jusqu'ici et même si j'ai une famille plutôt compréhensive en général, ils n'ont pas tout le temps adhéré à ma façon de faire. L'indépendance te fermera des portes, mais c'est la seule façon de vivre en accord avec soi-même.
Cette quête de l’indépendance, c’est finalement le fond de ton concept album ? Elle a des allures sages cette histoire, mais pas tant que ça ?
Jean Elliot Senior : L'album est à double lecture. On peut l'entendre au premier degré, comme l'histoire d'une plante qui s'échappe, mais on peut aussi y entendre l'histoire universelle de l'adolescence et de son lot de découvertes, d'expériences et d'émancipations. Comment on finit par s'extraire de son substrat familial et culturel pour devenir un être unique avec ses propres idées. Dans le fond c'est un album sur l'adolescence, l'émancipation.
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