C'est déjà la vingt-quatrième édition de l'incontournable festival balbynien "Théâtres au cinéma".
Cette année, le festival s'articule autour de la figure singulière du cinéaste Philippe Garrel.
Enfant prodige, considéré comme le "Rimbaud du 7ème art", figure de proue de "l'underground" post-soixante-huitard, Garrel est devenu à l'heure de la soixantaine un cinéaste classique fort de toutes ses expériences artistiques.
Toujours nourri de ses vies, il a désormais remis pied dans la fiction, à bonne distance du pathos et du factice.
De "Marie pour mémoire" à "Un été brûlant", Garrel n'a cessé de travailler sur les formes. Plus sensuel qu'intellectuel, il explore les corps et les visages, reste fasciné par les artistes et les perdants, refuse le naturalisme et la psychologie. Il cherche toujours la vérité des âmes, des âmes en quête d'amour, et la déniche en poète et en rêveur.
Son cinéma, à la fois métaphysique et physique, s'appuie fortement sur l'acteur. C'est là où son œuvre illustre bien le thème "Théâtres au cinéma".
Depuis quarante ans, Garrel a saisi l'acteur au travail. Son regard s'est posé sur des acteurs à l'intériorité fiévreuse comme Laurent Terzieff, Pierre Clémenti, Jean-Pierre Léaud ou Lou Castel. Amoureux ou admirateur, il s'est aussi passionné pour le mystère féminin. Des icônes des années 1960-1970 (Nico, Zouzou, Jean Seberg, Anne Wiazemsky) aux stars contemporaines (Catherine Deneuve, Monica Bellucci), Garrel a filmé la femme comme aucun homme ne l'avait fait.
Et puis, évidemment, il y a Maurice et Louis, son père et son fils. Trois générations de Garrel réunis une ultime fois dans "Un été brûlant". À Bobigny, on pourra revoir, outre ceux dirigés par Philippe, une sélection de films interprétés par Maurice Garrel notamment "La Maison des Bories" de Jacques Doniol-Valcroze et le très rare "Jean-Luc persécuté" de Claude Goretta.
Le Festival de Bobigny profitera aussi de la présence de Philippe Garrel pour faire redécouvrir et rendre hommage au Groupe Zanzibar, collectif qui sous la houlette de Philippe Garrel et de Patrick Deval fut très réactif et très créatif après Mai 68. C'est toute l'histoire, pas encore vraiment écrite, du bouillonnement de l'après-Mai qui se lit dans des essais filmiques estampillés du sceau de l'utopie.
Dans ce riche programme, on pourra aussi en savoir plus sur "Antonin Artaud et le cinéma", grâce à une "ciné-promenade" concoctée par Dominique Païni, revoir "La Passion de Jeanne d'Arc" de Dreyer, découvrir des films consacrés à Artaud ainsi qu'un certain nombre d'oeuvres dans l'esprit de l'auteur du Théâtre de la cruauté, comme le "Marat-Sade" de Peter Brook ou "Susana la perverse" de Luis Bunuel.
Enfin, en clôture, le très copieux festival "Théâtres et cinéma" s'achèvera avec une avant-première très attendue : "Hannah Arendt", le "biopic" de Margarethe von Trotta consacré à la philosophe de "la banalité du mal".
|