Comédie dramatique d'après l’œuvre éponyme de Guy de Maupassant, adaptation et mise en scène de Vica Zagreba, avec Vahid Abay, Régis Bocquet, Guillaume Bienvenu (en alternance Nicolas Martzel), Franka Hoareau, Laure Portier et Sébastien Rajon.
Quand on lit Guy de Maupassant, on est toujours surpris par la fluidité du récit, par sa précision dans les détails subtilement déposés sur le papier pour décrire ses personnages. Chez lui, même l’ambiguïté est nette, tranchante.
Dans ses conditions, adapter un roman de Maupassant pour la scène est une tâche moins facile qu’il n’y paraît : rendre visible l’évidence est loin d’être évident.
On ne pourra donc que féliciter Vica Zagreba pour avoir adapté et mis en scène "Pierre et Jean" en ayant fait les bons choix pour en conserver l’esprit.
Du court roman de Maupassant, elle a su garder le parcours, les mouvements. Elle n’a pas cherché à en forcer artificiellement la "théâtralité", à en restituer le cadre naturaliste et s’est attachée à retrouver les bonnes articulations de ce récit dans lequel une famille heureuse cesse de l’être à cause d’un héritage inespéré, révélateur de secrets douloureux.
Sur une scène dépouillée, où l’irruption du moindre élément sert à évoquer un lieu comme un bateau, une jetée, Vica Zagreba a dessiné un grand livre d’images, jamais figées comme celles d’Epinal.
Elle a su raconter la montée de l’affrontement des deux frères sans se perdre en explications. L’échange de quelques mots suffit pour qu’on comprenne le fossé que cet héritage creuse entre eux. Tout va très vite dans cette version de "Pierre et Jean", une vitesse quasi cinématographique.
Mais quand le drame s’exacerbe, quand le dénouement approche, les choses reprennent une forme plus théâtrale et l’on a droit à des scènes plus denses entre les deux frères et leur mère, pour parvenir à un final émouvant.
Servi par six comédiens vifs et pleins d’allant, Vica Zagreba a donc fourni une version habile et habité de "Pierre et Jean" qui devrait donner envie de lire le roman de Maupasssant.
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