Spectacle conçu et mis en scène par Christine Armanger et interprété par Christine Armanger et Olivia Renart.
Formée au théâtre et à la danse, Christine Armanger a conçu et mis en scène un spectacle performatif qui emprunte à ces deux disciplines et qu'elle présente comme une pièce allégorique traitant de l'inquiétante étrangeté de l'obscur objet du désir et de la violence du désir.
Le propos exploratoire sinon discursif se développe par le truchement de deux corps féminins dans une acception antinomique, aux antipodes l'un de l'autre en termes de représentation sexuelle : le corps érotisé vecteur du fantasme masculin versus l'essence d'un corps au "naturel" comme approche du désir féminin.
Le premier, arborant les signes extérieurs de la féminité prometteuse et de la sensualité aguicheuse, calque sa gestuelle sur les codes érotiques de la parade amoureuse à destination de la gent masculine. En contrepoint absolu, le deuxième, proche d'un corps anatomique, est dépourvu de tout artifice et mu par son propre désir.
"Pourpre" s'avère donc un travail particulièrement intéressant tant par sa thématique que par sa forme qui repose sur la dramaturgie du corps. Sur le plateau nu, seul un musicien guitariste, Cédric Michon, émerge de l'obscurité. La scénographie repose essentiellement sur les jeux de lumières travaillées par Alice Versieux qui délimitent les espaces de jeu et localise les aires d'apparition des personnages.
Olivia Renart, cheveux blond vénitien, peau laiteuse et corps aux formes voluptueuses qui renvoient au stéréotype de la pin-up des années 50, se dévoile, sous les bas, la robe en satin à la Gilda et les moues à la Marilyn, avec une parcimonie savamment mise en scène qui suscite davantage l'excitation physique et sexuelle comme un réflexe pavlovien que le désir qui ressortit davantage au mental.
Christine Armanger, abondante chevelure cuivrée, corps malingre dont elle exacerbe la musculature nerveuse et la saillance des os et revêtu d'une simple robe blanche, utilise ce dernier comme vecteur d'un désir propre qui ne connaît pas la limite de la pudeur et s'autogénère de manière parfois inquiétante comme une pulsion irrésistible et indomptable.
La petite robe blanche comme la typologie du corps et le travail corporel de Christine Armanger n'est pas sans évoquer celui sur le corps parlant et le corps désirant de la danseuse et chorégraphe Pina Bausch qui a introduit le concept de danse-théâtre.
Christine Armanger signe un spectacle atypique, reposant sur une indispensable implication avertie des officiantes pour mettre en oeuvre la force tragique du corps, et maîtrisé quant à l'hybridation des arts, qui apporte sa pierre, au delà du désir féminin, au champ de réflexion sur la jouissance qui donne existence au corps humain.
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