Sous sa casquette d'auteur, Jean-Michel Ribes, par ailleurs metteur en scène, cinéaste et directeur du Théâtre du Rond-Point, publie aux Editions du Seuil, dans la collection "Le goût des mots", un jubilatoire opuscule écrit au gré de sa fantaisie.
Et à lire au gré de celle d'un lecteur qui partage avec lui le goût des chemins de traverse, du désordre, de l'absurde, du loufoque, du burlesque, de l'humour multicolore et du rire de résistance. Bref, sous peine de flagrant délit de flagornerie, n'en jetons plus la coupe est pleine. D'ailleurs dans "Les mots que j'aime et quelques autres...", Jean-Michel Ribes se penche avec délectation sur les quelques expressions et mystérieuses associations de mots telles "servir à rien" et la "roupie de sansonnet".
Au menu de son vagabondage au pays de la polysémie et de son dictionnaire personnel qui refuse catégoriquement l'ordre alphabétique car "tous les ordres ont été combattus, j'ai bon espoir que l'aphabetique, fondé par je ne sais quel moine ou grammairien despote, le soit enfin", propre à devenir un livre de chevets dans lequel puiser chaque soir un éclat de rire ou une pensée dadaiste, des coups de coeur telle sa déclaration d'amour... à l'artichaut ("...S'il fallait tout recommencer je vivrais avec un artichaut...") et des coups de griffe bien sentis ("L'existence de la mauvaise foi prouve que la foi n'est pas une croyance forcément bonne. C'est rassurant").
Le lecteur trouvera également des aphorismes qui font la nique à ceux de Cioran ("Vie : La vraie question n'est pas de savoir qu'il y a une vie après la mort, mais s'il y en a une avant"), des délires allitératifs (pour "coquin" car "...j'avais juste envie d'écrire ces mots les uns derrière les autres"), des définitions percutantes ("Langue de bois : Langue écologique qui ne pollue pas la pensée dans la mesure où elle n'en contient pas"), des considérations burlesques (pour asticoter : "Mais en quoi l'asticot nous taquine, puisqu'il nous adresse la parole que quelques jours après notre décès, période où notre susceptibilité s'est beaucoup assagie ?"), des
interrogations sémantiques ("Synonyme : Quel est le synonyme de synonyme ?") et même de petites anecdotes.
Et comme Jean-Michel Ribes ne s'impose aucune limite créatrice, il propose également un "cinquante/cinquante" désopilant ("Ils ont le Vietnam, on a le Père-Lachaise"), suggère à l'Académie de nouveaux mots pour pimenter la langue française, de "tiban" (petit banc) à "brantignou" (habit de soirée lapon), et, s'inspirant de la pharmacologie, propose la création de mots génériques
pour participer à la réduction de la dette (par exemple "GIX" pour stratocumulus).
A consommer à dose homéopathique pour déguster en gastronome les saveurs de l'esprit.
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