Comédie dramatique de Mike Bartlett, mise en scène Mélanie Leray, avec Marie Denarnaud et Elina Löwensohn.
Avec "Contractions", le jeune dramaturge anglais Mike Bartlett propose une partition théâtrale basée sur une thématique chère à la littérature d'anticipation, celle de la dystopie totalitaire en l'occurrence appliquée au monde de l'entreprise dans une déclinaison machiavélique des techniques de management pathogènes issues des principes de la psychologie sociale.
Dans une multinationale nommé "le Groupe", les employés signent un contrat de travail, en fait un contrat d'adhésion aux multiples clauses qui constituent une véritable toile d'araignée inféodant le signataire, et pour lesquelles tout manquement immanquablement repéré par un système de vidéo-surveillance doit être immédiatement réparé à défaut duquel est appliquée une sanction drastique, celle du licenciement pour faute grave qui exclut le coupable du monde du travail.
C'est pour ne pas avoir respecté la claude d'interdiction de relation sentimentale et/ou sexuelle entre salariés du Groupe qu'une jeune femme est convoquée et sommée d'obtempérer.
Mike Bartlett pousse le processus jusqu'à l'abomination, au-delà du burn-out jusqu'à la destruction par implosion de l'individu dans un huis-clos en quatorze tableaux qui sont autant de stations d'un chemin de croix au nom de la gloire du père nourricier qu'est "le Groupe" omnipotent dont la main armée est "la Responsable", une femme dépourvue d'affect qui, de la surtilisation des règles disciplinaires aux injonctions paradoxales, maîtrise toutes les stratégies de manipulation et d'oppression.
A la mise en scène, Mélanie Leray signe une direction d'acteurs exemplaire et la partition, qui se déroule dans une immense et impersonnelle salle de réunion scénographiée par David Bersanetti, est portée par deux excellents comédiennes.
Le bourreau, Elina Löwensohn, visage de glace et gestuelle d'ophidien, campe parfaitement l'implacable spider-woman qui avoir ferré sa proie y plante son chélicère pour la dissoudre de l'intérieur avant de l'ingérer dans une transe quasi orgasmique.
Bouleversante, Marie Denarnaud, incarnation idéale de la jeune femme saine, vivante éclaboussante de beauté sensuelle, manifeste une belle maîtrise de jeu pour incarner la victime d'un engrenage d'autant plus monstrueux qu'il induit son acquiescement. 7
Une exceptionnelle réussite. |