Là où l'on parle de Valerie June, il est à chaque fois question de Mississippi, de blues et de soul. De cette Amérique post-esclavagisme et de quelques pontes de la musique de genre comme Muddy Waters.
Pourtant, à l'écoute de Pushin' Against a Stone, on y entend bien plus que ce qu'ont l'habitude de faire les jeunes gens qui veulent imiter un style. Pas de voix nasillarde pour reproduire le son des micros de l'époque, pas de guitare sur un ampli ayant déjà rendu l'âme en 1962. Non, à la place on trouve un son moderne, frais et une voix magnifiquement posée, claire, épanouie et séduisante qui, à aucun moment, ne tente d'imiter ses illustres aînées, si ce n'est dans les thèmes abordés dans les textes (des titres comme "Workin' Woman Blues", "Tennessee Time" parlent d'eux-mêmes).
Lorsque Valerie June fait appel à des choeurs gospel, c'est sur la superbe ballade "Somebody to Love" toute en finesse qui, registre vocal mis à pire, pourrait venir tout droit d'un album de Leonard Cohen, période The Future. "The Hour" est également une petite perle dans le genre. Fluide et élégant sans rien de superflu, même pas les choeurs pourtant omniprésents.
Plus loin les guitares électriques mèneront le bal (le disque a été enregistré dans le studio de Dan Auerbach des Black Keys et on sent sur "Pushin' Against a Stone" ou "You can't be told" la touche blues électrique du groupe. Électricité qui paradoxalement apporte un côté plus roots à la musique de Valerie June.
Valerie June et ses dreadlocks incroyables qui la font ressembler à une déesse marine joue sur le terrain difficile du blues, de la soul et de la country sans en hériter des travers. C'est épuré et délicat comme une Alela Diane touchée par la grâce ou une Amy Winehouse qui aurait laissé sa vulgarité et son chant surjoué au vestiaire ("Wanna be on your mind"). Même "Tennessee Time" qui a le double défaut de contenir le mot Tennessee dans le titre et d'être un duo avec un chanteur qui semble s'appliquer à adopter une voix nasillarde "comme là-bas". Pourtant, encore une fois, la voix de June porte le titre et lui donne une insoupçonnable légèreté.
Un album aussi élégant que fort en personnalité, exactement comme la photo de la pochette le laisse entendre. Une belle découverte. |