Spectacle conçu et inetrprété par Eleonor Agritt et Edouard Ferlet.

Retracer en notes et en sourires, en mots et en images, une vie qui s’est écoulée en toute simplicité, en toute complicité amoureuse, tout au long d’un siècle tumultueux, c’est le pari réussi de "Jean", "Opéra de poche transdisciplinaire" qui conte et raconte l’existence de Jean, musicien amateur sparnassien…

Entre Mado, sa femme pendant cinquante-sept ans, et son piano d’Ingres, Jean a traversé le vingtième siècle en bon habitant d’Épernay, la coupette de champagne dans une main et le morceau de brioche dans l’autre. Tous les Champenois confirmeront ce qu’a observé Fabrice Melquiot : les années passent, mais le plaisir des bulles et des langues de chats ne faiblit pas chez eux et leur donne des bouffées d’audace pour combattre leur éternelle timidité.

De l’audace, il en fallait pour mettre en musique cette vie minuscule. Une audace chaleureuse comme la voix d’Éléonor Agritt, qui peut passer des airs d’opéra à la chansonnette et qui interprète avec aisance les musiques d’Édouard Ferret, avec qui elle partage une scène où trône un piano parmi quelques éléments censés évoquer l’intérieur de la maison de Jean.

Disciple de Michel Legrand quand il colorait musicalement les films de Jacques Demy, Édouard Ferret crée une ambiance pleine de modestie, cohérente avec la vie sans bruit et sans fureur de Jean et de Mado.

Sans doute, en se refusant au spectaculaire, toute la belle équipe de "Jean" décevra ceux qui pouvaient s’attendre à quelque chose de plus clinquant, de moins nostalgique. Les autres, qui aiment qu’une "petite musique lancinante" les poursuive, seront heureux d’entendre longtemps vibrer en eux l’écho de la voix d’Éléonor Agritt et ne désavoueront pas les trouvailles graphiques de Jeanne Roualet, qui préfère procéder par petites touches candides plutôt que de faire appel à des effets spéciaux époustouflants.

Au bout de cette belle heure bulle de savon, on aura partagé quelques moments dans l’intimité d’un homme simple, à qui l’on souhaite de connaître le paradis des gens biens, où l’on espère que l’a attendu Mado, avec moult coupettes et force brioches…