Spectacle conçu, écrit et interprété par Maya Boquet, Lenka Luptakova et Kerwin Rolland.
"Radio femmes Fatales # Lenka Nehanebna" constitue avec "Une étrange aventure de Jo Preston" un diptyque théâtral singulier et original, tant en la forme qu'au fond, conçu et interprété par Maya Boquet, comédienne, metteur en scène et assistante à la réalisation des fictions radiophoniques sur France Culture, et Lenka Luptakova, comédienne.
Elles proposent une partition dans laquelle sont menés de front trois axes réflexifs : l'exploration du médium radiophonique, les limites entre réel, réalité, fiction et représentation, et la figure féminine, de l'iconification à l'instrumentalisation.
En la forme, en l'espèce, cela commence comme une incursion dans le studio d'enregistrement d'une émission de radio, qui est annoncée comme une vraie émission de radio transmise en direct sur une vraie radio.
Cette émission intitulée "Radio Femmes Fatales" consacrée au parcours de "femmes imprenables, capitales et pas banales" est animée par une pseudo-journaliste du style "plus spécifiquement attachée à la culture" qui reçoit une jeune femme tchèque nommée Lenka Luptakova, venue retracer la biographie fragmentaire d'une actrice tchèque nommée Lenka Nehanebna.
Cette actrice féministe, provocatrice et subversive, bien que méconnue, aurait traversé l'histoire du cinéma depuis ses débuts dans son pays dans les années 30 jusqu'à la Nouvelle vague en passant par le néo-réalisme italien avec pour projet sa disparition de l'image.
Mais de manière étrange et imperceptible, quelque chose semble se dérégler dans le déroulement de l'interview avec l'animatrice dépassée, campée par Maya Boquet, du fait du comportement de l'invitée interprétée par Lenka Luptakova chez qui s'opère ce qui paraît être une confusion de personnalité avec celle de son sujet d'étude.
Jouant et déjouant les références notamment cinématographiques, de Roberto Rossellini à Vera Chytilova, et musicales, des Delta 5 au Velvet Underground en passant par Patti Smith, les deux officiantes, véritables riot girls post-modernes, superposent les strates fictionnelles, du jeu à la manipulation, et concoctent un objet théâtral non identifié assez inattendu et déroutant qui puise dans les fondements du théâtre performatif.
L'entreprise bien ficelée au plan dramaturgique est particulièrement réussie. Voilà deux filles à suivre de près.
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