Mars en Marche est le deuxième album de Tristen. Mars est le dieu de la guerre. S'agit-il de reprendre les armes, d'avancer casqué à l'assaut, à la conquête d'un nouveau territoire ? Epoque des combats et des polémiques qu'aucun jugerait aussi oiseux que passagers, Tristen ne propose pas un nouveau manifeste. Un simple constat de déréliction.
"L'attraction des corps", "Le lustre", "En solitaire", "Laisse pleurer les hommes", "La femme qui ne souriait jamais", "Ce qui reste de toi", "Les boites aux lettres", "10000 jours", "Le phoenix aux fleurs", "La pluie horizontale", "Sur le sol" sont les titres de ce nouvel album qui tire son inspiration des angles morts des récits. Les longues routes, les faits divers sans éclat, les hommes qui n'égalent pas leur destin (j'aime trop cette formule d'Apollinaire !), Tristen navigue nonchalamment entre Mathieu Boogaerts et Dominique A et creuse un sillon sensible personnel. Du goût pour le quotidien blafard et l'ordinaire... qu'on ne transforme en combat que dans les BD de Larcenet.
Mars en Marche n'est qu'au début de la route. Les ennemis sont annoncés comme chez Buzzati (ce n'est pas une marque de voiture, je précise) mais les factions sont lasses de les attendre. Ennemis invisibles de quoi rendre fou. Les univers hostiles, les femmes qui ne sourient pas, les grandes espérances, les prises de sang sont les thèmes de la déroute, des langueurs moites. Où est Charlie ? Ah ! Charles Baudelaire, c'est à vous ! : "Il ferait volontiers de la terre un débris / Et dans un bâillement avalerait le monde. / C'est l'Ennui ! - L'oeil chargé d'un pleur involontaire". En effet, prenons garde au spleen et protégeons notre appétit et notre curiosité. Et sinon, Tristen, tu as essayé d'adopter un chien ? |