Si Watoo Watoo n’est pas revenu dare-dare de La Fuite de 2007, son dernier effort est loin d’être plan-plan. Voix haute perchée, guitare basse, le couple Pascale et Michaël Korchia joue sur le contraste et aligne dix bluettes sentimentales aussi désenchantées que sautillantes. Des comptines faussement naïves (les premières notes de "Un lundi comme un autre" sur la première plage) qui racontent le spleen des textes de monsieur mais sur le ton enjoué comme un pinçon de madame et un rythme primesautier. Presque un clin d’œil quand on sait que le père de l’oiseau souriant du dessin animé diffusé dans Récré A2 et à qui le duo emprunte son nom (René Borg, par ailleurs réalisateur des Shadoks), est mort quelques jours après la sortie de l’album.
De l’ombre à la lumière. Pendant que leur ville accueillait l’année dernière le festival emblématique du renouveau French Pop, les Bordelais qui ont de la bouteille fourbissaient les armes de leur retour. Un grand cru qui dispense aux jeunes gens modernes, au premier rang desquels Granville, un cours magistral de pop ligne claire accrocheuse, que Tricatel doit regretter de ne pas abriter. Gageons que l’engouement autour de la nouvelle Nouvelle Vague bleu blanc rouge contribue à donner enfin une plus grande audience à ces orfèvres discrets de la cause indé hexagonale qui, comme Hugo ou Dominique Dalcan, refont aujourd’hui surface.
Une bouffée d’oxygène qui prend certes son inspiration dans le passé (celui où l’on mentionnait encore un enregistrement "stéréo" et où les morceaux dépassaient rarement deux minutes trente), mais qui pioche dans son panthéon. Aux détracteurs qui seraient tentés de qualifier, par un raccourci facile, leur musique d’ascenseur, en référence à la pochette, on opposera que l’easy listening de Watoo Watoo n’est pas de bas étages. Lorsque violons, cuivres et orgues s’envolent, il atteint même des sommets qui ressuscitent le Swinging London ("Le soir" et ses arrangements gainsbouriens) et John Barry (le générique du feuilleton déjà culte "Minnax"). Burt Bacharach sortant d’une retraite sous les tropiques ("Searching for Mr Right"). Plus près de nous, on sonne les grandes heures de Stereolab (le single éponyme) et l’on se souvient du premier Broadcast ("Ne m’oublie pas"), un groupe endeuillé lui aussi…
Ebloui par un certain âge d’or, ce regard dans le rétro offre à Watoo Watoo un nouvel horizon, le sacre du printemps qui commence. |