Le printemps pointe le bout de son nez quelques heures et déjà vous rêvez d’été, de demis bien frais et de concerts en plein air. Vous n’êtes pas très raisonnables. Voyez, la grisaille est déjà de retour… Vous voilà bloqués à l’intérieur et déçus, coupés dans votre élan ? Qu’à cela ne tienne, profitons-en pour ressortir nos albums de l’hiver et nous préparer aux festivals à venir !
Commençons ce jour par Septième ciel, septième album des Fatals Picards, groupe de scènes au plus d’un millier de concerts. Il serait fort étonnant de parcourir les festivals de l’Hexagone et de ne pas croiser la route de ces quatre musiciens et de leur bande rapprochée. Le ratio albums/concerts doit indiquer tout de suite au festivalier novice, la très nette propension de cette formation au live en tout genre. En conclure que l’album est pour les Fatals le support d’actualité prétexte à une tournée emplie de dates, est un pas qu’il n’est pas idiot de ne pas hésiter à réaliser…
Aussi est-il toujours d’une bien complète vanité, de palabrer à propos d’un de leurs albums, tant ceux-ci sont liés aux prestations scéniques qui les entourent, et tant ils prendront chair une fois désossés pour se greffer aux anciens titres, donnant vie aux tournées, s’incarnant pour du spectacle vivant.
Cette analyse, à la pertinence sans faille, doit aiguiller notre apprenti festivalier, vers un début de compréhension du style non-style des Fatals Picards. En effet, la première écoute à n’en pas douter, le convaincra d’abord que l’album ne parvient pas vraiment à choisir son style. Pourtant, éclairé par l’orientation présentement proposée, il conviendra d’admettre que ce n’est pas le style de l’album qui importe, mais le traitement, chanson par chanson, du style Fatals Picards, dans les liens entre albums et dans une écoute prospective tournée vers la scène. Alors bien sûr, notre festivalier néophyte retrouvera les riffs rock de plus en plus assumés depuis trois albums, au détriment du son malpropre des guitares punk, et ce même avec un Didier Wampas choriste sur un diaboliquement énergique "Punks au Lichtenstein". Il entendra les réminiscences de rythmes de l’historique Pamplemousse Mécanique sur le versant chanson française du groupe, tels "Gros con", "De l’amour à revendre"… Il comprendra l’absurdité d’origine dans les curieux "P.P.D.E.", "Pogo d’amour"… C’est bien le traitement de chaque morceau, et son inscription dans un des champs historiques du groupe qui forgent l’identité Fatals Picards de l’album.
Notre festivalier en préparation pourra être tenté de réduire la proposition du groupe, à une production de parodies, mais assez vite il conviendra de faire amende honorable et de dépasser le simplisme de cette hypothèse. La parodie, strictement, indiquerait une volonté d’initier sa démarche à partir de modèles à reproduire, en en accentuant tel défaut ou en déformant tel aspect, afin de renvoyer du modèle premier, une image moqueuse, drôle ou critique. Dans la performance du groupe qui nous intéresse ce jour, c’est davantage un processus de création que nous observons à la genèse du morceau, création qui se pare ensuite des apparats du thème choisi, pour apporter le traitement comique et décalé propre au groupe et à son univers précédemment décrit. Le fatalisme est un humanisme. Des morceaux comme "Hortense", "Atomic Twist", "Manouches", "Le dimanche au soleil" illustreront clairement ce parti pris. En conclusion, chez les Fatals Picards, l’essence précède l’existence. CQFD. Euh… qu’est-ce qu’il fallait démontrer déjà ? Que palabrer à propos d’un album des Fatals Picards était d’une bien complète vanité. Ah ben oui alors, CQFD !
Alors terminons en soulignant que Septième Ciel comptera comme un bien bel album dans la discographie du groupe, ouvertement indépendant, réellement rock, et des plus prometteurs pour les live à venir. "Peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’Everest…". Peut-être que les Fatals Picards atteignent avec Septième Ciel un sommet dans leur savoir-faire. Chacun jugera. Mais souhaitons-leur, car là les attendra le plus beau challenge après le sommet. C’est alors que le plus grand reste à atteindre... |