Spectacle musical conçu et mis en scène par Serge Hureau, avec François Marillier, Raphaël Sanchez, Olivier Hussenet et Serge Hureau.
Expert espiègle de la ritournelle, Serge Hureau est l'âme du Hall de la Chanson. Il y distille avec générosité sa bonne humeur et sa connaissance universelle de la matière.
Dans "On chantait quand même", il s'intéresse à "la chanson à la radio sous l'Occupation". Comme à l'époque, les chanteurs venaient souvent interpréter en direct leurs œuvres, il a "reconstitué" sur le plateau un studio de radio qui va, tour à tour, être celui des radios françaises ("Radio Paris,", "Radio Nationale"), de "Radio Berlin", de "Radio Londres" et de "Radio Lausanne".
En avant toute donc pour un instructif et roboratif tour d'horizon de la chanson d'une époque noire où les artistes populaires ont su souvent trouver des mots justes et forts pour toucher les cœurs meurtris, où les mélodies ont pénétré au plus profond des âmes et résonnent encore aujourd'hui, soixante-dix ans après, avec une force étonnante.
Le parcours emprunté par Serge Hureau et ses trois complices est sans faute de goûts artistiques, historiquement parfait et politiquement pimenté de ce qu'il faut d'incorrect.
On y croisera, parmi bien d'autres, Zarah Leander et Maurice Chevalier, Charles Trenet et Suzy Solidor. On y rendra un hommage nécessaire et appuyé au rutabaga. Serge Hureau passe en un tournemain de la gouaille d'une Fréhel à la veulerie d'un speaker pro-allemand et s'amuse avec Pierre Dac à bien répéter que "Radio-Paris ment, Radio-Paris est allemand".
À ses côtés, Olivier Hussenet interprète remarquablement les grandes dames de la chanson en allemand comme en français. Frissons et émotions garantis quand il déploie sa belle voix au service de Lily Marlène ou de Leo Marjane.
On n'oubliera pas de féliciter tout le reste de la troupe et en particulier, Raphaël Sanchez dont les échos pianistiques ont su retrouver la couleur musicale de cette époque sombre et Philippe Marillier qui joue subtilement les bruiteurs et les guitaristes. Mentions spéciales, radio oblige, au son de Tania Volke et aux lumières savantes de Jean Grison qui reconstituent finement ces années noires.
Cette promenade radiophonique, jamais kitsch et sans inutile nostalgie, est pleine de temps forts, comme cette belle version de "la complainte du partisan" ou ce beau moment pendant lequel les chanteuses proscrites pour d'infâmes raisons raciales, René Lebas et Marie Dubas, chantent la douleur de leur exil.
Bravo Serge Hureau. On sait désormais qu'il y a à Paris un endroit qui porte haut la culture populaire. |