Du 1er au 3 août prochains se déroula la 13ème édition du Fesival Les Nuit Secrètes. Sébastien Coupez, directeur de l'association, nous en dit un peu plus au travers de quelques questions.
Au moment où s’affiche un peu partout des hausses sur la billetterie, les Nuits Secrètes sont, elles, pratiquement gratuites. Comment vous positionnez-vous dans ce paysage festivals français ?
Sébastien Coupez : Nous avons imaginé ce projet au départ comme un espace d’échange culturel ouvert à tous. Il nous est apparu normal de le rendre accessible au plus grand nombre. La gratuité de la Grande Scène et les tarifs démocratiques ont été un les leviers du succès du festival. Cette année, nous avons imaginé un principe encore plus solidaire, Les Nuits Suspendues, sorte de cagnotte partagée à destination des publics les plus éloignés du monde culturel.
Vous vous démarquez aussi avec une programmation où le copier-coller a peu sa place. Très peu de groupes qui font la "tournée des festivals" sont chez vous. Est-ce une véritable volonté d’éveiller des curiosités ou / et une contrainte budgétaire ?
Sébastien Coupez : Oui, l’équipe a toujours souhaité être dans l’ouverture et la découverte. Le directeur artistique table sur une programmation réfléchie en fonction des univers et et des originalités des artistes et groupes. Ils peuvent être populaires mais véhiculer des principes et des propositions à la scène qui doivent toucher, étonner, interpeller. Quand, en plus, les grosses têtes d’affiches internationales peuvent être vues sur beaucoup d'autres festivals…
N'est-ce pas un risque supplémentaire ?
Sébastien Coupez : Imaginer notre type de programmation, c’est un risque qui a tendance à s’effacer au fur et à mesure. La confiance s’est installée entre le festival et le public. Ce dernier se laisse de plus en plus prendre à des aventures musicales.
Le festival joue, non pas sur sensationnel, mais sur les sensations… Certains disent qu’on ne ressort pas indemne de vos Nuits… Pour vous, nous bousculer dans nos convictions fait-il partie de votre vision de ce que doit être vraiment un festival ?
Sébastien Coupez : C’est un événement où l’on passe d’un espace à 13 000 spectateurs sur la Grande Scène à 80 dans un Parcours Secret. Cette différence chamboule effectivement les sens des spectateurs et laisse au public des émotions uniques que l’on vit par ailleurs de moins en moins souvent. Les Nuits secrètes ont toujours souhaité être à contre-courant des standards d’organisation des festivals. C’est aussi pour cela que le festival est devenu un temps fort musical repéré.
Du coup, constatez-vous un profil particulier de festivaliers ? Y a-t-il beaucoup de Pro (programmateurs par exemple) qui y viennent faire "leur marché" ?
Sébastien Coupez : Nous ne savons pas vraiment si les pros viennent nous rendre visite, mais nous avons remarqué que certains de nos concepts sont réutilisés ou remixés et nous sommes plutôt fiers de cela. Plus il y aura de projets musicaux qui feront la part belle aux différences et aux artistes. Les festivaliers des Nuits Secrètes ont un moyenne d’âge de 28 ans. C’est plus haut que les autres festivals français. Les Nuits Secrètes accueillent devant les scènes un mélange de familles, de spécialistes de musique, de curieux, d’artistes locaux, et tout cela crée une ambiance plutôt joyeuse.
La botte secrète des Nuits est ses fameux Parcours Secrets. Les artistes se prennent-ils facilement au jeu ? N’est-ce pas frustrant pour le spectateur qui ne peut y avoir accès, les places étant relativement limitées ?
Sébastien Coupez : Les Parcours Secrets sont de plus en plus prisés. Les artistes répondent facilement oui aux sollicitations de ce concept, même s’ils sont curieux de comprendre comment ça fonctionne au réel. Lorsqu'il arrive dans son lieu, chaque artiste se met à imaginer une nouvelle manière de faire un live. La proximité, le lieu, le son, les lumières transforment l’approche artistique de chacun d’entre eux.
Les spectateurs ne peuvent pas tout voir sur le festival. 70 concerts et Parcours Secrets, c’est beaucoup ! D’autant plus que le public des Parcours se rend aussi sur les différentes scènes et que l’horaire de passage de certains artistes correspond au départ des bus. Je ne crois pas que cela soit frustant. Cela crée des échanges entre les spectateurs qui, au coin du bar, se racontent les artistes vus.
Ces parcours font-il l’objet de création particulière ?
Sébastien Coupez : Presque systématiquement. Les lieux nécessitent de repenser les choses. Il faut savoir se remettre en cause pour jouer dans ces conditions. Le public est souvent à moins d’1 mètre de l’artiste, le son est adapté, les sensations complètement nouvelles...
Autre curiosité du festival, les Sessions Secrètes. Quel en est le principe ?
Sébastien Coupez : S'il y a un principe pour les Nuits Secrètes, c’est d’être en perpétuelle mutation afin de toujours surprendre. Les Sessions Secrètes sont, cette année, transformées en Secret Station. Un principe original, là aussi. Deux bus anglais vont accueillir l’équipe des Secrets Sessions (une vingtaine de musiciens issus du Nord et de Paris). L’équipe a pour mission d’imaginer des morceaux originaux composés en 2h maximum et qui seront produits en live durant les 3 jours à côté de la scène Jardin.
La grande scène est gratuite depuis le début, 13 ans après, cela prend-il un sens supplémentaire ?
Sébastien Coupez : C’est un concept fondateur du festival. La gratuité permet de faciliter l’ouverture culturelle et de créer des rencontres humaines nouvelles. Cela donne l’occasion de faire la fête tout en proposant une programmation exigeante et ambitieuse. Sans cette scène, le festival aurait eu un succès différent. Mais il y a aussi gratuité pour les concerts Secret Station et les perfomances Blue Pillow...
Du semi gratuit quand il faut quand même payer les cachets d’artistes, au demeurant de plus en plus élevés. Sur quelle économie repose le festival ?
Sébastien Coupez : Des subventions provenant du Conseil Régional Nord Pas de Calais, du Conseil Général du Nord, de la Communauté d’Agglomération de Maubeuge et de la Ville. Les recettes supplémentaires viennent des mécènes, des bars et de la billetterie du festival.
Une baisse des aides d’argent public s’annonce un peu partout, qu’en est-il pour les Nuits Secrètes ? Y a-t-il pour ambition (ou solution) de s'associer fortement à un tourneur comme le fait Beauregard, le Pitchfork, Rock En Seine, etc. ?
Sébastien Coupez : Nous n’envisageons pas de solutions de ce type, peu en phase avec les valeurs que nous défendons. Nous travaillons à la consolidation des financements en développant le privé et les recettes propres. Notre festival a une histoire. Cette histoire est intimement liée à celle de son territoire. Les Nuits Secrètes doivent continuer à se construire avec les gens qui les entourent.
En pleine crise, vous lancez les Nuits Suspendues, pouvez-vous nous en dire plus ?
Sébastien Coupez : Le principe est de rendre le public solidaire des personnes et familles qui n’ont pas les moyens d’accéder aux espaces payants. C’est une gagnotte collective qui se remplit et qui permet de distribuer des accès aux moins riches d’entre nous pour aller voir des lives au Jardin ou à la Bonaventure. Cette cagnotte est disponible sur le web et sur place dans les points de vente du festival. C’est une nouvelle expérience de partage, que nous testons cette année.
10 raisons de venir aux Nuits Secrètes ?
Sébastien Coupez : - Parce que l’hospitalité et le sens de la fête dans le Nord n’est pas qu’une simple légende.
- Parce que les Nuits Secrètes ont une manière unique de jouer avec Aulnoyes Aymerie, la ville qui les accueille.
- Parce que les Nuits Secrètes ne sont pas que des concerts, mais une succession de sensations.
- Parce que si vous êtes curieux, et que vous aimez les surprises, les Nuits Secrètes sont faites pour vous.
- Parce que sa programmation est ambitieuse et originale.
- Parce que les Parcours Secrets vous feront découvrir des lieux insolites de l’Avesnois.
- Parce que ses tarifs sont indécents.
- Parce que c’est le seul festival où vous trouverez des agents secrets bénévoles (et sympathiques).
- Parce que le train est à 1 € de toutes les gares du Nord Pas de Calais
- Parce qu'il n’y a qu’aux Nuits Secrètes que vous pourrez entendre Arno tout en dégustant de la boulette d’Avesnes !
Quel autre festival pourrait se trouver complémentaire aux Nuits Secrètes pour les festivaliers "abonnés" aux festivals d'été ?
Sébastien Coupez : Difficile de répondre par un seul ! Je dirais que nous nous trouvons des dénominateurs communs avec les Trans à Rennes, La Route du Rock à Saint-Malo et Le Rock Dans Tous ses États à Evreux.
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