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André Téchiné  juillet 2014

Réalisé par André Téchné. France. Drame. 1h56 (Sortie le 16 juillet 2014). Avec Guillaume Canet, Catherine Deneuve, Adèle Haenel et Jean Corso.

Avec "L'homme qu'on aimait trop", qui aurait pu s'intituler de manière plus appropriée "Une femme disparaît" si le titre n'était déjà attribué, André Téchine a investi un fait divers retentissant car largement médiatisé, la disparition en 1977 d'Agnès Le Roux, surnommée "l'héritière du casino le Palais de la Méditerranée".

Ce fait divers non élucidé qui a longtemps défrayé la chronique et donné lieu à un incroyable feuilleton judiciaire, dont n'oseraient rêver les scénaristes les plus imaginatifs, et qui, après presque quatre décennies, connaît encore de nouveaux rebondissements, s'est déroulé sous le règne du fameux Jacques Médecin à l'époque de la guerre des casinos et des magouilles municipales sous l'ombre de la Pieuvre et du blanchiment d''argent mafieux.

La fille de la directrice du casino disparaît brutalement après avoir provoqué la destitution de sa mère et encaissé sur un compte suisse la contre-partie financière de son vote qui allait entraîner la liquidation de l'établissement. Son corps n'a jamais été retrouvé mais la justice va poursuivre pour assassinat son amant ex-conseiller de la mère, qui avait procuration sur son compte.

In limine, un "avertissement" indique au spectateur qu'il s'agit d'une "oeuvre de fiction inspirée de faits réels", et précise donc de manière superfétatoire qu'est préservée la liberté de création du cinéaste, ce qui introduit une certaine ambiguité, voir confusion des genres, en floutant la frontière entre la fiction et la réalité d'autant que sont utilisés les noms réels et que le scénario a été élaboré avec un membre de la famille Le Roux.

Cela étant, au terme d'un bel exercice d'équilibriste, André Téchiné a réussi à contourner les pièges de la transposition filmique du fait divers et désamorcer les éventuelles critiques qui y sont attachées en s'abstenant tant d'un manichéisme jésuitique que de la science infuse du deus ex machina pour résoudre ce qui demeure une énigme.

Et pour éviter de filmer "à charge" et tendre vers la neutralité par une approche "objective", il adopte des parti-pris forts et inattendus. D'une part en reléguant en toile de fond du contexte politico-financier pour privilégier une intrigue familiale, en l'occurence à la manière d'un Dallas à la niçoise avec une relation mère-fille conflictuelle ancrée dans le passé.

Ensuite, en traitant le drame non comme une enquête documentaire ou policière, évitant l'écueil de tenter d'éclaircir ou de solutionner une histoire truffée d'incertitudes, de zones d'ombre et d'énigmes comportementales, mais comme une confrontation quasi-militaire, avec la manipulation comme arme de destruction, qui s'achèvera par la défaite du vaincu qui n'est pas une victime "innocente".

Et ce non en bilatéral mais sous forme triangulaire, le trio constituant un topique dramaturgiquement plus efficace. Evidemment pas celui "mari-femme-amant" du vaudeville, mais un trio infernal et délétère formé par la mère, la fille et l'amant.

Enfin, contrairement à sa présence en haut de l'affiche sous forme de verbe conjugué dans le titre, le rôle principal n'est pas attribué à l'amour mais à l'argent. Car c'est l'argent qui constitue de dénominateur commun des protagonistes, tous trois égocentrés, qui sont, certes à des degrés différents, à la fois manipulateurs et instrumentalisés.

Cette approche, qui implique une démonstration illustrative, impacte sur la forme du film qui, par la multiplication des focales, devient kaléidoscopique et souvent elliptique. Ce n'est pas vraiment gênant en ce qu'il laisse au spectateur une certaine latitude pour assembler le lego selon son ressenti. Mais cela peut également en déconcerter certains.

C'est Renée Le Roux, la mère, PDG du casino, la "reine du Palais" qui est déjà engagée dans un bras de fer avec le "Napoléon des jeux", l'homme d'"affaires" corse Jean-Dominique Fratoni, directeur du casino, franc-maçon d'obédience mafieuse, qui déclenche, de manière bien inconséquente et surtout stupide, les hostilités sur deux autres fronts.

D'une part, avec sa fille Agnès, en refusant de procéder à la liquidation de l'héritage paternel, oubliant qu'elle détient des parts dans la société exploitant le casino qui constituent une minorité de blocage.

D'autre part, avec son conseiller juridique, Maurice Agnelet, un avocat ambitieux devenu son conseiller et éminence grise qui, à défaut d'avoir réussi à devenir un as du barreau, espère être récompensé de ses bons et "loyaux" services par le poste de directeur général du casino, qu'elle lui refuse fort peu diplomatiquement en lui rappelant sa condition et le traitant comme un laquais.

Catherine Deneuve est magistrale en rombière vêtue de Marcelle Griffon de luxe, emperlousée et diamantisée comme un arbre de Noël qui se pavane dans les ors rococo et agit comme une intouchable, usant du paternalisme d'un autre siècle avec ses petits employés, de la toute puissance méprisante avec les autres et de l'indifférence voire de la cruauté avec sa fille.

Guillaume Canet, que la quarantaine a étoffé, prête parfaitement son physique lisse de gendre idéal et son jeu monolithique à l'avocat séducteur-gigolo dépourvu d'affect comme de scrupules qui séduit d'autant plus qu'il annonce ne pouvoir ni vouloir s'attacher et ne cache ni son opportunisme ni sa vénalité. Car il y a toujours des femmes au cerveau de midinette qui pensent être celle qu'il aimera.

Ce qui est le cas d'Agnès qui voit en lui le héros de l'histoire exceptionnelle qu'elle veut vivre dont la partition est dévolue à la jeune Adèle Haenel qui, manifestement, compte tenu de la caméra aux gros plans ardents qui s'attache à sa personne, entre dans le panthéon des actrices qui fascinent le cinéaste, ce qui fait parfois tendre le film vers le biopic.

Adèle Haenel manifeste une belle maîtrise dans l'incarnation de la jeune femme janusienne physiquement, prototype parfait de la fille saine, solide, sportive, sensuelle naturelle, spontanée et équilibrée qui s'avère psychologiquement douloureuse, instable, névrosée, en vaine quête d'amour et de reconnaissance maternelle, dépressive et suicidaire capable des pires débordements d'enfant butée.

Le film aurait gagné à s'arrêter avec la disparition inexpliquée et quasi inexplicable de la jeune femme.

Mais, encore une équivoque embarrassante, André Téchiné y adjoint le volet judiciaire, totalement dispensable, pour se recadrer sur la réalité qui s'explique peut-être également par la fascination qu'il éprouve pour Catherine Deneuve qui jalonne sa filmographie dont il dit qu'elle est "un sphinx qu'il interroge" et à qui il propose de repousser les limites.

En conséquence, le film s'attache à la figure de l'ex-reine laminée qui se mue en mater dolorosa, se découvre une vocation de mère courage et part en croisade pour obtenir la tête de l'avocat présumé assassin. Après la lumière éclatante de la Riviera, l'obscurité des prétoires.

Dommage d'autant que André Téchiné métamorphose Catherine Deneuve en petite vieille miséreuse attributaire de l'ASPA vêtue à la manière des veuves siciliennes du novecento, un rôle de composition dans lequel, malgré son talent, elle manque de crédibilité.

 

MM         
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