Réalisé par Werner Herzog. France. Documentaire. 1h15 (Sortie le 6 décembre 2014). Avec
Werner Herzog n'est pas que l'auteur de fictions marquantes qu'il a souvent tournées en compagnie de son double Klaus Kinski, comme "Aguirre, la colère de Dieu", "Nosferatu" ou "Fitzcarraldo".
C'est aussi quelqu'un qui, en cinquante ans de carrière, n'a jamais renoncé au documentaire et qui y a mis autant de convictions et d'énergie que pour ses grandes fresques inventées.
Le mot "énergie" est avec "souffle" et "vitalité" l'un des mots majeurs d'un cinéaste qui a toujours aimé payer de lui-même et surtout ne jamais attendre pour atteindre les lieux les plus inaccessibles, ceux qui rendre tout à coup accessibles les rêves les plus fous.
En associant deux des "courts-métrages", l'un consacré à l'éruption de "La Soufrière", volcan de la Guadeloupe, l'autre à l'ascension du "Gasherbrum" par Reinhold Messner, "Les Ascensions de Werner Herzog" fournit un bon résumé des convictions vitalistes et poétiques du cinéaste.
Il donne aussi l'occasion de découvrir ou de redécouvrir des images merveilleuses de deux événements extraordinaires. Qui ne sera pas saisi par Basse-Terre déserte, lieu étonnant qui pourrait être une préfecture de la métropole profonde, où tout le monde a fui le danger du volcan qui gronde, où ne restent que quelques animaux hébétés et affamés et où l'on a l'impression de respirer une fin du monde proche.
Rarement des images ont atteint cette intensité. On sent que ce que le cinéaste et ses compagnons ont filmé et ce que le spectateur voit était un pari à quitte ou double. Herzog est à Basse-Terre comme Pline l'ancien à Pompéi, comme si Pline avait survécu et avait pu raconter, heure par heure, stylet en main comment la colère du Vésuve n'avait finalement pas eu lieu...
Et que dire de l'autre film, "Gasherbrum, la montagne lumineuse", dans lequel on découvrira deux légendes de l'alpinisme allemand, Reinhold Messner et Hans Kammerlander, saisis dans l'accomplissement d'un de leurs plus grands exploits. Herzog est en effet allé les filmer au milieu de leur exploit le plus insensé, celui où ils vont enchaîner l'ascension de deux sommets de l'Himalaya de plus de 8000 mètres, sans assistance, sans radio ni oxygène.
Le film est d'autant plus émouvant et fort que Messmer est sous le choc de la mort de son frère, une mort qui fera polémique et qu'on lui reproche aujourd'hui encore.
Réflexion intense et brute sur le sens de la vie alors qu'on la risque vraiment, "Les Ascensions de Werner Herzog" est un témoignage d'une beauté vertigineuse.
Ici, rien n'a le goût d'un reportage vidéo ni d'un sujet de journal télévisé. Werner Herzog prouve en un plan de La Soufrière ou en une image des neiges éternelles de l'Himalaya ce qu'être cinéaste veut dire. |