On ne dit pas ringard, on dit vintage. Tout est dans la précision du vocabulaire, les amis. La pochette de l’EP de LiZ est une jolie représentation vintage de la divine Elisabeth Taylor (la femme aux yeux violets… avant qu’elle se marie cinquante fois… avant que sa peau ne ressemble à une tentative ratée de réhydratation de pruneau au collagène… avant qu’elle n’apparaisse systématiquement affublée d’une ostentatoire rivière de diamants gros comme des boulets). Elle serait donc une sorte d’idéal masculin pour les quatre gars de LiZ (en plus d’être le nom de leur groupe, oui).
La musique n’est pas vintage, non. Ou bien si, carrément, tout dépend de quel côté on se positionne. Quatre titres et quatre types pour se rendre compte : Rémi Lamigeon au chant, Benoit Delvigne à la guitare-basse (hop, un coup d’épaule, hop, on échange, guitare dans le dos, basse devant… prodigieux !), Fabien Guidi aux guitares (hop hop hop) et Vincent Bednarek à la batterie.
Des guitares sifflantes aux accents de violons pour relire les pages tournées, les occasions manquées, les moments foirés, les choses qu’on n’a pas osées, et tous ces petits détails qu’on voudrait bien effacer, ou retenter. Tout ce qui fait que notre vie n’est pas vraiment telle qu’on l’avait rêvée. Et si on les laissait aller ? ("La vie rêvée")
Des guitares encordées, qui fleurent la tristesse des séparations, des départs, des petites fins et de cette foutue manie qu’on a de s’habituer au chagrin. De ce qui nous rend les peines moins douloureuses à cause du temps qui passe, qui nous plonge même parfois dans l’incompréhension de ce qu’on a fait, grâce à la distance ("J’entends encore").
Des guitares semi geignardes, qui sentent à pleins tympans la mélancolie des fins de soirée. Quand les couples s’étreignent sans aucune pudeur, tandis que vous rechignez à regagner le lugubre de vos pénates silencieuses ("Elizabeth").
Des guitares rythmées (ça ne va pas casser les cordes, ça ?) pour peupler les songes, repousser l’ennui et masquer le tragique des fantômes du passé. Quand fuir la réalité permet aussi de la comprendre "la noirceur de l’ennui, les lumières de la nuit qui t’attiraient et jamais ne te laissaient" ("Qui s’en souviendra").
Ça sent (bon) la mélancolie, ce laisser-aller qui arrive à la faveur d’un moment de contemplation, d’une bribe de mémoire, d’un souvenir incarné par un fantôme. Quoi de plus approprié que des cordes pour dire la nostalgie et l’amertume douce-amère que laisse le temps qui passe, les désillusions et l’espoir qui s’accroche toujours et encore ?
En français, en anglais, en cordes et en gratouilles, en rimes et en mots, LiZ a le parfum de la mélancolie, celle qui inspire et s’autorise une parenthèse de calme dans un corps qui gronde. Une pause douce et mélodieuse, comme un mouchoir tendu entre deux sanglots, comme une éclaircie dans la tourmente, comme un souvenir pour ne pas oublier. Sans en faire des tonnes, sans brasser de l’air pour des pommes, en toute pudeur et sans vulgarité. Du rock raffiné à la française, entre dandy et vagabond, mystérieux et introverti.
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