Réalisé par Zoltan meyer. France. Drame. 1h36 (Sortie le 25 mars 2015). Avec Yolande Moreau, Qu Jing Jing, Ling Dong Fu, Liu Ling Zi, Yilin Yang, André Wilms et Li Chenwei.
Le début de "Voyage en Chine" de Zoltan Mayer a un parfum finlandais, au sens "kaurismakien" du terme.
Sur l'écran, en effet, il y a un couple banal, vieillissant, pas bavard, dans lequel chacun n'est plus très concerné par l'autre. Comme il s'agit du duo Yolande Moreau-André Wilms, la référence à Kaurismaki s'impose.
Mais le film ne va pas longtemps emprunter cette piste : le couple apprend la mort de leur grand fils unique. Installé en Chine, il a eu un accident et il faut s'occuper de rapatrier le corps.
Liliane, sa mère, décide de prendre les choses en main pour faire le deuil, pour en savoir plus sur ce fils parti si loin et déjà si loin de sa vie froide.
"Voyage en Chine" est l'histoire d'un double voyage, celui que Liliane effectue à la recherche du fils disparu et celui qu'elle fait en elle à la recherche du sens perdu de sa propre existence. Zoltan Mayer est, à l'origine, un photographe renommé et son goût de l'image éclate dans chaque plan. "Voyage en Chine" est d'abord un régal des yeux à l'égal d'un reportage du magazine "Géo" ou "National Geographic".
En même temps que Liliane, pleine de préjugés ne serait-ce que sur la nourriture, on va donc découvrir la beauté millénaire d'une Chine rurale plutôt riante. Ici, on sera bien loin de la Chine béante de noirceur de Jia Ziang Ke ou de Wang Bing, mais si le parti-pris est de montrer une Chine pleine de couleurs et de gens heureux, truculents ou espiègles, on n'est tout de même pas dans un "village Potemkine" chargé de la propagande touristique.
Liliane-Yolande, avec sa peine profonde, est plutôt dans un univers chinois à la Pagnol, avec ses figures typiques et chaleureuses, comme celui de sa logeuse. Elle s'y immerge peu à peu, cherchant à comprendre pourquoi son fils aimait ce pays, l'avait laissé seule face à son mari pour cet autre monde.
Impossible de ne pas dire que Yolande Moreau est formidable, avec sa lourde silhouette envahie de malheur. Les scènes qu'elle partage avec la splendide petite amie chinoise de son fils arrachent des larmes. Zoltan Mayer s'attache à décrire les rites qui entourent la disparition de l'être cher, montre comment Yolande Moreau se laisse guider par eux pour « guérir » sa peine et s'imprégner de l'univers chinois.
"Voyage en Chine" de Zoltan Mayer est un film qui ne sent pas la fabrication. Le long chemin parcouru par Liliane pour se trouver au-delà de la mort de l'être chéri paraît naturel. Faisant fi de toute psychologie, préférant la pudeur au pathos, le film offre au spectateur qui y sera sensible une jolie leçon d'humanité. |