La grande exposition du printemps 2015 est celle consacrée au maître espagnol Diego Velasquez organisée par la Réunion des Musées Nationaux-Grand Palais et le Musée du Louvre en collaboration avec le Kunsthistorisches Museum de Vienne qui en a présenté précédemment une monstration réduite.
L'événement est d'autant plus exceptionnel qu'aucune exposition monographique ne lui a été consacrée en France et que la plupart de ses oeuvres sont "sanctuarisées" au Musée du Prado qui se défait rarement de ce patrimoine et jamais des "Ménines" considérées comme un monument qui ne se déplace pas.
Velasquez, c'est une des icônes universelles de l'Histoire de l'Art, le maître incontesté de la peinture baroque espagnole, la figure tutélaire invoquée par les plus grands peintres des siècles subséquents, et pour ne citer qu'un exemple, de son compatriote Picasso qui a tenté de percer le mystère de son tableau emblématique avec ses variations sur "Les Ménines", une ambition de carrière de peintre du roi satisfaite dès l'âge de 24 ans et une production restreinte d'à peine plus d'une centaine de toiles.
Sous le commissariat de Guillaume Kientz, conservateur au département des Peintures du Musée du Louvre, la monstration présente de manière chronologique un large panorama didactique de l'oeuvre de Velasquez dans une scénographie réalisée par l'Atelier Maciej Fiszer qui mise sur une sobriété classique et les contrastes chromatiques pour rythmer la visite.
Velasquez, le peintre du Siècle d’or espagnol, peintre des rois et roi des peintres
L'exposition ne s'engage pas dans une réflexion sur l’auto-représentation et la méta-peinture alors même que les toiles de Velasquez sont perçues comme une œuvre auto-réflexive initiant de surcroît une interactivité avec le spectateur.
Toutefois, le parcours
est instillé d'oeuvres de certains de ses contemporains, Zurbaran manquant à l'appel, qui permettent d'entrevoir tant les influences possibles que l'environnement pictural de l'époque avec ses oeuvres de jeunesse, des peintures de dévotion, des scènes de genre et placées sous le signe du naturalisme et du caravagisme, puis ses échappées vers le paysage et la peinture d'histoire à l'occasion de ses voyages en Italie.
Le visiteur pourra également découvir la rareté dans le répertoire velazquezien que constitue le nu avec la "Vénus au miroir", prêt exceptionnel de la National Gallery.
Mais Velazquez triomphe dans l'art du portrait, son registre de prédilection, et inhérent à sa fonction de peintre de cour. C'est dans la contrainte, celle du respect de la tradition du portrait de cour espagnol, un portrait officiel destiné à afficher, de manière ostentatoire, le rang, la puissance et la fortune, qu'il trouve son espace de liberté et de novation en s'attachant à un réalisme figuratif qui est moins une approche psychologisante qu'une représentation sensible de l'humanité incarnée.
Une humanité qui peut être acerbe, telle celle des courtisans, mais également tendre comme celle des enfants royaux et notamment de l'héritier du trône, Baltasar Carlos, sur lequel repose tous les espoirs de la dynastie des Habsbourg d’Espagne.
L'exposition consacre également une salle aux portraits de la reine Marie-Anne d'Autriche et des infants réalisés dans l'atelier de Velasquez .
Velasquez, "le peintre des peintres" selon l'expression notoire de Edouard Manet, est cependant un peintre sans postérité nonobstant l'oeuvre de "Los Velazquenos" qui tend davantage vers le baroque italianisant et le syncrétisme vénéto-flamand à la Van Dyck et celle de son gendre et disciple Juan Bautista Martínez del Mazo
Une salle est consacrée à ce dernier qui a notamment réalisé un tableau intitulé "La famille de Philippe II" qui est une copie d'après les fameuses "Ménines".
La salle comporte une ligne de fuite qui aspire le regard vers l'ultime salle conçue comme un épilogue.
Plongée dans l'obscurité, il en émerge une immense toile représentant un puissant cheval blanc sellé mais dépourvu de cavalier qui se révèlera entouré de deux autoportraits de Velasquez. La deuxième ambition de Velasquez était d'être anobli. Peu avant sa mort, il fut nommé chevalier de l'Ordre de Santiago.
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