Deux avis peuvent s’opposer pour ce disque mais aussi pour son auteur Jacco Gardner. On peut trouver que cet Hypnophobia est juste un très bon disque de pop, aux chansons pas mal écrites du tout avec une excellente production, ce qui est exactement vrai, ou deuxième possibilité que cet disque est un énième album de pop psychédélique ou retro futuriste ou ce que vous voulez, impeccable certes mais un disque de studio, déjà entendu des milliers de fois depuis les années 60 et qui sera oublié aussi vite qu’un autre du même acabit sortira. Le revival comme une épine dans le pied de la pop. Phénomène assez récent dans l’Histoire de la musique, en tout cas sous cette forme presque récurrente. Les compositeurs pendant la période romantique, par exemple, si au départ ils se référent au Moyen Age ou à la Renaissance, ils n’en adoptent ni la grammaire, ni les instruments. Deux avis qui différent, mais qui résument bien une époque esthétiquement perdue, entre une musique pop qui commence à tourner en rond à force de regarder dans le passé ou son nombril, le jazz qui se cherche un nouveau souffle et une musique classique qui revient à une néo-tonalité voire à un néo-romantisme 3.0.
Jacco Gardner nourrit une passion, fascination pour la musique psychédélique en général (Syd Barrett notamment) et la pop "baroque" des années 60 en particulier (The Left Banke, Montage, The Zombies…). Une époque qui est l’inspiration principale de son premier disque : Cabinet Of Curiosity. Il se tourne avec cet Hypnophobia vers une musique, moins naïve, plus progressive, plus onirique (et plus proche de Air et de Broadcast) où la frontière entre rêve (ou cauchemars) et réalité s’estompe, où l’inconscient, ses fantasmes et ses chimères prend le dessus sur le conscient.
La musique de ce disque est envoûtante si tant est que l’on accepte d’être envoûté, en groove syncopé (la basse tout en rondeur), planante à souhait ("Find Yourself", "Another You", "Hypnophobia"), s’étire pour dégager toutes ses finesses ("Before The Dawn"), joue à la belle des champs de pavot ("Brightly", "Face To Face") mais se révèle surtout un précis de composition pop (le brillant "Outside Forever") où il faut avouer le Batave excelle, et de recherches mélodiques et sonores formelles (autant pour l'extrême attention portée à l’enregistrement, aux couleurs, aux instruments…). C’est le problème avec ce disque. C’est bien écrit, c’est vraiment très bien réalisé, mais on n’est pas loin de penser qu’il ressemble à un puzzle, une sorte de best of ultra calculé (peut-être le plus gros reproche qu’on puisse lui faire) où l’on retrouve tout ce qui fait l’esthétique du genre, où l’on (re)connaît toutes les ficelles, les instruments, les harmonies et les suites d’accords. Un bel album certes mais s'il y a 40 ou 50 ans on aurait pu crier au génie, en 2015 un peu moins…
Cette semaine, c'est le retour de la MARE AUX GRENOUILLES, vendredi soir à 21h en direct sur Twitch, c'est gratuit alors on compte sur vous ! D'ici là, voici le programme de la semaine. Retrouvez-nous aussi sur nos réseaux sociaux !