Monologue dramatique d'après un roman de Albert Cohen interprété par Eurialle Livaudais dans une mise en scène de Guillaume Gras.
Dans la proposition de la jeune Compagnie Samson formés par des comédiens issus de l'Ecole d'art dramatique Jean Périmony, "Ariane" n'est pas la princesse mythologique qui fournit au héros Thésée le fil qui lui permettra de sortir du labyrinthe après avoir tue le Minotaure mais l'Ariane au bain de Albert Cohen.
Les soliloques d'Ariane dans le roman-culte qu'est "Belle du Seigneur", considéré généralement comme le roman de la passion amoureuse absolue et, par d'aucuns, comme un simulacre orchestré par un séducteur qui flatte le fantasme narcissique de sa proie, constituent une belle partition rêvée pour les comédiennes tant pour la beauté de l'écriture cohénienne que pour le romanesque du personnage.
Les monologues introspectifs présentés en triptyque permettent successivement d'esquisser le profil psychologique de la jeune femme narcissique, névrosée et confinée dans un imaginaire qui la distrait d'une vie médiocre et de circonscrire son mal-être aggravé par un mariage malheureux avec un homme ordinaire, ce qui permet d'éclairer le dernier volet consacré à la révélation de l'extase amoureuse et quasiment mystique qui érige la communion sexuelle en eucharistie profane.
Pour la scénographie, Claire Broës a opté pour le minimalisme symbolique avec une baignoire vide et des panneaux d'aluminium, qui sous les lumières en clairs-obscurs de Grégoire de Lafond, évoquent le miroitement de l'eau.
Fine, grâcieuse, adoptant une afféterie tant gestuelle et que vocale qui correspond au personnage et avec une diction précise, Eurialle Livaudais parvient, par la maîtrise des inflexions, des intonations et des ruptures, à restituer le flot de paroles qui traduit un flux de pensées enchâssées dépourvu de ponctuation.
L'exercice est difficile d'autant que la partition s'avère dense et la comédienne dispense une belle et sensible prestation nonobstant quelques dérapages vers les aigus induits par le rythme très rapide assigné par la mise en scène de Guillaume Gras. |