On a souvent imaginé ce qui se passerait si Jésus revenait sur terre aujourd’hui, déjà en 1970 le plus grand chanteur américain de Belgique, Johnny Hallyday, l’imaginait en Hippie, c’est d’un banal. Carlos Salem a une bien meilleure idée : plutôt que de s’intéresser à Jésus, sur lequel d’ailleurs on a déjà tout dit ou presque, si on s’intéressait plutôt à son petit frère, le plus jeune fils de Dieu donc.
Je vous le présente : il s’appelle Dieu Jr, en toute modestie comme son père, né de l’union de Dieu et de Mariah, qu’il a rencontré dans une communauté hippie pleine de marijuana et de LSD, il a une trentaine d’années, il est un peu vulgaire, un peu bobo, il pue des pieds, il vit à Madrid, le fait que Carlos Salem soit espagnol explique sans doute ceci. Il est en colère contre son père et est très jaloux de son frère, envieux même, il veut lui aussi être connu de tous, être adulé, être aimé et vu comme le messie et pour ça il est prêt à tout. Et soyons franc : Dieu Jr est un prodigieux casse-couilles.
Après plusieurs tentatives plutôt infructueuses, quoi de mieux que la télévision pour atteindre rapidement une notoriété internationale ? Malheureusement, le show prévu avec Dieu Jr ne se passe pas si bien que ça et quelques années plus tard, les "journalistes" qui y ont participé finissent par être tués, massacrés plutôt, les uns après les autres, évidemment Dieu Jr est le principal suspect. Poe, le narrateur, écrivain, ancien disciple du frère du crucifié, ne peut pas croire à sa culpabilité et va donc mener l’enquête et tenir une vieille promesse : écrire l’évangile de Dieu Jr.
Je ne vous en dirais pas plus de l’histoire, parce que ce serait gâché le plaisir (à ce propos, ne lisez surtout pas la quatrième de couverture qui, comme souvent en dévoilant trop de choses, évente beaucoup de surprises – Spoiler Alert, comme disent les jeunes et River Song).
Alternant le récit de l’enquête et l’évangile de bière-fiction de Dieu Jr, Le plus jeune fils de Dieu est un polar haletant, jamais avare en rebondissements et en plus extrêmement drôle. Réussissant grâce à de savants flashbacks à construire de vrais personnages plus que la simple caricature de flic, d’écrivain, de fils de dieu, ou de mythomane, on ne sait pas vraiment, Carlos Salem invente et développe un monde loufoque, blasphématoire et donc totalement jubilatoire, où tout est possible, fait de fausses pistes, de bières et d’alcools en tous genres, de sexe et évidemment de meurtres sinon ça ne serait pas un polar. Il réussit à nous prendre à son jeu avec beaucoup de drôlerie, à nous faire perdre en conjecture, à nous surprendre. Plus profond qu’il n’y paraît, interrogeant sur le pouvoir de la télévision, sur l’arrivisme et sur la croyance. Un livre qui donnerait presque envie d’espérer un retour d’un messie.
- T’es pas sérieux, là ?
- Si. |