Réalisé par Michel Gondry. France. Comédie. 1h43 (Sortie le 8 juillet 2015). Avec Ange Dargent, Théophile Baquet, Diane Besnier, Audrey Tautou, Vincent Lamoureux, Agathe Peigney, Douglas Brosset et Charles Raymond.
Jamais où on l'attend, Michel Gondry, après ses conversations animées avec Noam Chomsky, le plus grand intellectuel américain, est revenu en France... Et à un cinéma modeste, autobiographique, sans effets spéciaux et peu de bricolage, si l'on exclut la "voiture-maison", clou du film.
D'emblée, on pourra s'interroger : film avec des ados ou film pour ados ? Et l'on finira par renoncer à répondre à la question en admettant que "Microbe et Gasoil" ne choisit pas son camp et laisse plutôt au spectateur la possibilité de marcher ou pas dans les pas des deux compères.
S'étant mis à portée de ces deux protagonistes, Michel Gondry n'est plus un naïf qui écoute le grand linguiste, mais un naïf de douze-treize ans qui dessine et qui rêve de la belle Laura. Ici, sa naïveté est fécondée par sa mémoire et par la part d'enfance qui n'a pas quitté ce grand gamin de cinquante ans.
"Microbe", c'est lui. Un p'tit gars un peu à part, qui ne cesse de crayonner, et qui aimerait qu'on le remarque, même s'il sait que c'est le physique qui compte et que le sien n'est pas remarquable. Un p'tit gars qui n'a qu'un ami, peut-être déjà plus en marge que lui, "Gasoil", un as de la mécanique aux cheveux brun bouclés.
Les deux vont donc faire la paire et des quatre cents coups pas très méchants. Mais Doinel Antoine, dans le film de Michel Gondry, est double.
Si Microbe a son côté lunaire, il a, heureusement pour lui, une mère qui n'est pas volage, en la personne d'Audrey Tautou faussement sévère et drôlement compréhensive pour ce jeune ado peu conforme. C'est ce pauvre Gasoil qui endosse toute la part d'ombre de Doinel, avec une famille lourde comme un destin pourri tout tracé.
Michel Gondry, "le petit Mimi", ne s'apitoie pas. On le sent pourtant plein de pudeur pour retracer ces deux destins bien différents. On a beau les suivre dans leurs aventures d'enfants épiques à la Mark Twain, on sait vite qui sera Tom Sawyer et qui deviendra Huckleberry Finn.
Il y a bien un petit goût amer dans "Microbe et Gasoil" de Michel Gondry, celui de l'enfance qu'on se repasse et dont on comprend enfin trente ou quarante ans après tous les déterminismes contre lesquels il n'y avait rien à faire...
Dans la catégorie "petit film", Michel Gondry mène assez habilement sa barque poétique. Son film qui ne cherche pas à plaire à tout prix ne ressemble qu'à lui-même. Il a les qualités de quelqu'un qui n'est pas du sérail cinématographique et n'en fait qu'à sa mauvaise tête de cochon.
Clivant comme un cancre près du radiateur, "Microbe et Gasoil" de Michel Gondry aura ses partisans et ses détracteurs. Cette unanimité impossible est finalement ce qui caractérise les films d'auteur qu'ils soient ou non à la hauteur de leurs ambitions. |