Réalisé par Alanté Kavaïté. Lithuanie/France/Pays Bas. Romance. 1h30 (Sortie le 29 juillet 2015). Avec Julija Steponaityte, Aistė Diržiūtė, Jūratė Sodytė et Martynas Budraitis.
S'il fallait faire un vrai reproche au film rafraîchissant d'Alanté Kavaité, ce serait son titre "français". Car, même si ce joli moment que l'on va passer en compagnie de deux adolescentes, Sangaïlé et Austé, est estival, "Summer" est un titre d'une platitude au ras des pâquerettes pour une œuvre qui quitte constamment le plancher des vaches et aime prendre de l'altitude.
Certes, "Sangaïlé", le titre lituanien original, n'est pas très explicite non plus, puisque il fait référence au prénom de la jeune vacancière mal dans sa peau. Tant pis, il faudra se résigner à "Summer" en espérant que ce non-titre ne nuira pas à un film qui mérite vraiment d'être vu.
Alanté Kavaïté, sa réalisatrice, n'y a sans doute pas pensé, mais d'emblée, avec ses lieux très stylisés comme la maison de Sangaïlé ou le "bar de l'escadrille" où travaille Auté, pour ne pas parler de l'usine électrique qui aura son rôle dans l'histoire, son film fait penser parfois à "Bagdad Café". Certainement aussi à cause de l'importance de la musique, ici confiée à pas n'importe qui, c'est-à-dire JB Dunckel, l'un des membres du mythique groupe "Air".
Comme "Bagdad Café", "Summer" cultive l'étrangeté, le décalé, voire le poétique. Le film ne s'embarrasse pas d'une narration plan plan et privilégie les rapports entre ses personnages. On trouvera cependant une différence avec le film culte de Percy Adlon : "Summer", malgré ses plans de voltige et de vertige, ne sombre pas dans un maniérisme au final très contre-productif.
Si Alanté Kavaïté part d'une situation théorique, celle d'une rencontre improbable entre deux jeunes filles très antagoniques, l'une introvertie et suicidaire et l'autre tout sourire et pleine d'appétits créatifs, elle réussit à la résoudre par le cinéma.
Avant d'accepter l'amitié fusionnelle d'Auté, Sangaïlé, qu'on découvre dès sa première scène en train de se taillader les bras avec un compas, devra aller jusqu'au bord du gouffre. Occasion pour cette fille d'ancienne danseuse étoile d'exécuter une danse de mort et de défier la pesanteur.
La moue de garçon manqué de Sangaïlé, rageuse sur son vélo, s'oppose d'abord à la bienveillance du visage d'Auté, la couturière magique qui lui propose des gâteaux. Bientôt ceux-ci seront ses cakes d'amour et des preuves que la vie vaut d'être vécue, surtout si on la vit autrement en accomplissant des loopings.
Dans ce film plus universel que lituanien, on sera souvent dans les airs, à planer avec deux belles jeunes filles, deux grandes âmes qui se sont heureusement croisées avant de voler de leurs propres ailes.
On soulignera le casting judicieux de "Summer" et l'on félicitera Alanté Kavaïté pour ses plans défiant la pesanteur et qui donneront le vertige à bien des spectateurs.
Mais "Summer" d'Alanté Kavaïté rendra surtout heureux. C'est avec le regard ravi d'un enfant qui suit des yeux une grosse bulle de savon monter dans le ciel pour s'y perdre qu'on se délectera de ce film mystérieux. |