Ones and Sixes
(Sub Pop Records / PIAS) septembre 2015
Nombreux sont ceux qui ont pris le premier album de Low, I Could Live In hope, en pleine tronche au milieu des années 90. Ce disque sombre, poisseux, reste l’une des pierres angulaires du slowcore, ce genre musical où les guitares sont en berne et le moral dans les chaussettes. Difficile d’imaginer Alan Sparhawk faire de la musique festive. C’est une âme tourmentée. Il le sait. Il vit avec. Soyons clair : on ne parle pas du petit coup de blues passager qui se dissipe rapidement. On parle de dépression. De ce truc installé, de cette chape de plomb qui tombe sur ceux qui en souffre dès le réveil. En 2005, Alan Sparhawk a dû jeter l’éponge en pleine tournée pour "instabilité mentale". Dans une note bouleversante et lucide, il expliquait à ses fans que ça n’était plus possible et qu’il fallait qu’il s’arrête. Depuis une vingtaine d’années, Low est le moyen pour Sparhawk de tenter de contrôler les sorties de routes de son âme meurtrie. Un exutoire. Dans un style où il est très facile de sombrer dans une certaine routine et une certaine complaisance, Low s’en est toujours bien sorti. Sur The Great Destroyer (2005), on avait même senti poindre de belles éclaircies pop ("Monkey", "Califorinia").
Ones and Sixes est un disque bizarrement assez varié voire cyclothymique. Si certains morceaux évoquent la marque de fabrique du groupe comme le funeste "Gentle", les magnifiquement plombés "Lies" et "Landside" ou "DJ" où l’on retrouve ces guitares en capilotade, ce nouvel effort offre également des titres étonnamment accessibles et lumineux : "Kid In The Corner" avec sa basse chewing gum, le sublime et carrément tubesque "What Part Of me", et surtout le très aérien "No End". Car ce qui étonne surtout à l’écoute de ce disque, c’est sa production aérée et fluide. Le travail sur les voix est particulièrement saisissant, tout au long du disque. On comprend un peu mieux ce qu’Alan Sparhawk tentait d’expliquer au cours de l’interview sur le travail effectué par le producteur BJ Burton, sur les nouvelles possibilités qu’il a pu offrir au groupe avec cette production très ouverte et lumineuse.
Même si musicalement la comparaison est peu pertinente, Low est à rapprocher d’un groupe comme Yo La Tengo : même longévité, même carrière respectable sans vraiment rencontrer la succès mais même constat : la volonté, même au bout vingt ans de carrière, alors que l’on a plus grand chose à prouver, de sortir de très beaux disques comme Ones And Sixes. Au final, l’apanage des meilleurs" petits" groupes.
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