Spectacle immersif conçu par Julien Drion, avec Clara Hédouin, Julien Drion, Macha Dussart, Maximilien Seweryn, Pierre Giafferi et Sylvain Levitte.
Que se passe-t-il à la Villa Maria ? Mystère, mystère... On ne s'y rend pas, on y est convoqué. L'élégant cerbère qui garde son entrée s'empresse de poser sur le poignet gauche de chacun des candidats à la visite un bracelet de papier estampillé "Villa Maria".
On conseillera à tous ceux qui oseront faire cette expérience de bien mémoriser le numéro qui est inscrit sur ce bracelet...
Alignés hors de la villa, les spectateurs - qu'on définira plutôt comme des "spectacteurs" - attendent la bonne volonté du cerbère pour pénétrer chacun à leur tour à l'intérieur de la maison mystérieuse. On lit une certaine angoisse chez les participants, qui sont assez rudement poussés ou projetés dans ce lieu foetal où ils vont devoir passer une heure de leur vie.
Si l'on a pris la précaution de lire la petite carte présentant cette proposition théâtrale, on sait que la Villa Maria est une ancienne chapelle, qu'elle est habitée, et que chaque heure, ses habitants accueillent une quinzaine de spectateurs. Ceux-ci vont vite découvrir que la Villa Maria est avant tout une auberge espagnole où l'on trouvera surtout ce qu'on y a apporté.
Spectacle participatif où le murmure et le chuchotement sont de rigueur, où chacun déambule à travers les pièces au gré de son propre questionnement, "Villa Maria" est un capharnaüm, un tohu-bohu, un joyeux bordel.
Ici, les tenants de l'ordre théâtral où chacun est à sa place de part et d'autre de la scène en seront pour leurs frais. Les autres, ouverts à une autre expérience, en profiteront pour s'interroger sur la forme théâtrale...
Est-on vraiment au théâtre quand on franchit le seuil de la Villa Maria ? N'est-on pas plutôt dans un dispositif qu'aurait pu imaginer une Sophie Calle ? Ou ne va-t-on pas participer à un simulacre de "jeu de rôles", voire à une séance de la "ligue d'impro" ?
Si l'on veut complètement profiter des bienfaits de la "Villa Maria", il faudra y mettre du sien, accepter le face à face avec des personnages qu'on sait incarner par des acteurs, et inventer instantanément ses propres règles de fonctionnement.
Ainsi, certains préféreront papillonner d'une pièce à l'autre, lire les textes et les graffitis qui se trouvent sur les murs, visiter chacun des habitants et découvrir leurs univers respectifs, les interroger sur ce qu'ils signifient. D'autres souhaiteront garder leurs distances, écouter les conversations que les habitants tiennent avec d'autres visiteurs sans vraiment intervenir.
En tout cas, si tous les participants ne seront pas convaincus qu'ils sont allés au "théâtre" en visitant la Villa Maria, tous seront d'accord d'avoir eu en face d'eux de vrais acteurs.
A chacune des heures de visite, ils doivent redonner vie à un personnage forcément phobique ou décalé pour s'être retrouvé là. Ils doivent en adoucir les côtés caricaturaux tout en respectant "la Bible" du spectacle qui définit les personnages pour qu'ils agissent entre eux avec un minimum de cohérences. Certains, par exemple, on ne les dénoncera pas, disent des choses horribles sur leurs colocataires. On suppose ainsi que ces inimitiés ont été préalablement établies par les concepteurs du spectacle, Julien Drion et Alexis Gilot.
Comme spectateur, on constatera que tous les acteurs ont du répondant, et savent esquiver les questions insidieuses. Forcément, chacun aura ses préférés ou trouvera que certains rôles sont plus intéressants que d'autres. Augustin est-il un violeur de pré-adolescentes ? Victor, un pyromane dangereux ? Que penser du syncrétisme religieux de Morgane ? André est-il un fou furieux ?
Toutes les questions restent ouvertes et l'on n'oubliera aucun des six acteurs en quête de personnages : Julien Drion, Macha Dussart, Pierre Giafferi, Clara Hédouin, Sylvain Levitte et Maximilien Seweryn sont à l'unisson pour animer la Villa Maria.
Sans trahir tous les secrets de ce lieu étrange, et pour rassurer ceux qui auraient peur de s'y rendre, aucun spectateur n'est molesté ni brutalisé pendant l'expérience.
C'est peut-être d'ailleurs dommage puisqu'en pénétrant dans la villa, on est accueilli par une vidéo de "La Corde" d'Hitchcock qui annonçait le pire. Mais, pour les spectateurs timorés, c'est une bonne nouvelle qui devrait les inciter à venir se confronter à ce passionnant jeu théâtral.
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