Monologue dramatique écrit et interprété par Claire Guionie dans une mise en scène de Jessica Berthe.
Dans, l'ultime tableau de "¡ Mírame !", Claire Guionie, entre ombre et lumière, bien mise en valeur par Jessica Berthe, réussit la parfaite chrysalide de son personnage, Lola Romero.
L'émotion qu'elle sait alors tirer, entre violence contenue et rage exprimée, confirme ce qu'on sentait de temps en temps pendant le spectacle : elle a un grand potentiel comme actrice. Hélas pour la comédienne, il y a une autre Claire Gulonie, qui se veut auteur et qui ne sert pas toujours le registre de la première.
Au départ, elle a pourtant trouvé un bon "pitch", celui d'une actrice en devenir amoureuse d'un torero et qui finira... torera. Mais certaines des scènes qu'elle a choisies pour illustrer son sujet créent beaucoup de déperdition alors qu'elle aurait dû rester dans la tension de celles presque toutes réussies où elle est dans sa peau de matadora.
Ainsi en sera-t-il de la scène où elle est supposée passer un casting ou de celle où elle "subit" une interview avant de toréer de la part d'un journaliste sudiste, qu'elle interprète alternativement avec Lola de part et d'autre d'un éventail.
Peut-être aurait-il fallu que Claire Gulonie admette que la tauromachie nécessite de la trivialité et un constant premier degré dans son traitement. Ainsi même si on apprécie "Party girl" de Chinawoman, une jolie musique cool anglo-saxonne n'a pas sa place dans un monde où règne au pire les trompettes de "Carmen" au mieux certaines chansons tirées des films d'Almodovar.
Dans le décor unique où évolue Lola, et qui est censé être l'antichambre de l'arène, il y a une affiche d'une corrida où apparaissent les noms de Manolete et de Dominguin. Cela implique aussitôt que l'on pense à Ava Gardner ou Lucia Bose, ces stars glamours qui attiraient les toréros précités.
Claire Guionie, elle, a voulu moderniser, voire inverser le mythe : dans "¡ Mírame !", c'est le toréro qui conquiert la "tragédienne". On aurait aimé qu'elle tire plus de choses de ce parti-pris et qu'elle s'y engouffre à cœur battant.
C'est donc un sentiment mitigé que laisse au final "¡ Mírame !", spectacle potentiellement intéressant qui mériterait d'être retravaillé pour cesser d'être un hybride entre un "seul en scène" et une pièce à un personnage. |