Nous avons été parmi les tous premiers à Froggy’s Delight à parler de Kishi Bashi. Le chanteur et violoniste venait de sortir en avril 2012, 151A, petit bijou de pop moderne balançant entre lyrisme et un certain avant-gardisme qui ne manquait pas de charme.
Deux ans plus tard, le fantasque (euphémisme) musicien sortait, après avoir connu un relatif succès d’estime, Lighght, disque qui malheureusement perdait en luminosité pop ce qu’il gagnait en musique progressive douteuse, laissant alors un arrière-goût amer, celui de l’inachevé ou plutôt du mal achevé.
Que pouvions-nous encore attendre du "Nigel Kennedy de la pop" ? Qu’il ré aiguise notre curiosité en sortant un disque live (au rendu sonore excellent, les ingés son ont fait un super travail, le port du casque est conseillé…), la scène étant un endroit où il est plutôt à l’aise, accompagné d’un quatuor à cordes, ce qui semble somme toute assez logique. Bon, pour être tout à fait franc, si les arrangements et l’orchestration dudit quatuor évitent l’écueil (maniérisme pompeux) dans lequel était tombé le clown Chilly Gonzales dans le disque Chambers, nous ne sommes pas non plus chez le Kronos Quartet ou chez Ravel (mais en demandions-nous tant ?).
Kishi Bashi choisit la facilité d’une orchestration assez simple (simpliste), répétitive et harmoniquement élémentaire (souvent des accords de 3 sons à l’état fondamental). Mais l’intérêt de ce disque ne repose pas là, ou en tout cas pas vraiment là. En recentrant sa musique autour de sa voix (en faisant de plus en plus penser à Rufus Wainwright) et sur des mélodies enlevées, en laissant s’envoler avec virtuosité enfin pleinement son violon et offrant ainsi une belle palette d’émotions, Kishi Bashi redonne du sel à sa musique. Débarrassé de ses divagations, le musicien restitue toute leur valeur et surtout leur clarté aux différents morceaux qui composent ce disque.
"Atticus, In The Desert" prend des tournures orientales, "Manchester", "Carry On Phenomenon", "Conversations At The End Of The World" et "I Am The Antichrist To You" retrouvent leur lustre pop, "This Must Be The Place (Naive Melody)" des Talking Heads gagne une seconde jeunesse et "Bittersweet Genesis For Him and Her" une certaine simplicité. Et puis Kishi Bashi est un malin, à ce quatuor à cordes il adjoint intelligemment, notamment dans "Atticus, In The Desert" un banjo joué par le doux bucheron barbu Tall Tall Trees. Alors on assiste à une rafraîchissante explosion de couleurs. On espère que le violoniste chantant continuera de fouiller de ce côté, c’est vraiment là qu’il est le plus intéressant. A déguster comme il se doit donc.
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