Equilibre instable
(Artside / Believe Digital) février 2016
Nicolas Séguy, pianiste de Kery James, compositeur pour le théâtre et le cinéma, et pilier de l'album Midi 20 de Grand Corps Malade en 2006, sort en ce mois de février 2016, son troisième album Equilibre instable.
Antérieurement connu dans les années 2000 sous le sobriquet de S Petit Nico, l’artiste de 33 ans qui qualifie sa musique de hip-hop pianistique nous présente un univers dans lequel se rencontrent culture classique et culture hip-hop. A travers ses textes, l’auteur nous fait découvrir son monde intérieur dans lequel se cotoient les souvenirs (sans regrets) du passé ("Papi"), les interrogations du présent et la crainte de l’avenir.
Le morceau "J’ai grandi", tube mainstream potentiel, est le parfait reflet de l’album, l’auteur nous y présente cette dualité d’univers dans lesquels il évolue avec simplicité et bonheur ("j'ai grandi entre la platine et le piano, entre la nature et le béton"), tout en étant encore à la recherche de sa véritable place dans cette dichotomie existentielle ("rentrer dans le moule, faire ce qui nous plaît chaque jour de la vie"). Cette réflexion sur notre rôle dans ce monde fragile et instable, tient une place importante dans son univers, le morceau "J’cogite j’gamberge" et cette punchline révélatrice ("sommes nous ce que nous devons être") et quand la question reste sans réponse, l’artiste s’évanouit dans un univers cotonneux et rassurant ("je vis dans mes rêves").
Nicolas Séguy n’a pas seulement ce regard tourné vers le passé mais aussi une réflexion sur un présent qu’il ressent peu rassurant ("Ressens", "Tu cours") et une actualité bien effrayante, et c’est sur cette thématique qu’il se perd dans un texte qui emprunte les raccourcis de la facilité ("Terroristes"), seul faux pas de cet album. L'artiste nous y livre sa vision de la terrible actualité survenue en France en 2015, maladroitement Nicolas nous développe son point de vue sur la politique internationale et les conséquences obscurantistes qui en découlent, en se positionnant en observateur impuissant tributaire d’un monde fraternel sans frontières, dans l’acceptation des différences mais là nous pouvons nous interroger sur la maladresse des mots qui pourraient être injustement interprétés par un certain nombre ('les caricatures ont fait mal, le monde s’est senti stigmatisé, respectons son ressenti') et le très maladroit refrain '… politiciens terroristes…'…
Pourtant, c’est lorsque Nicolas dépose les armes de la colère, et qu’il se livre à l’exercice de l’introspection, qu’il touche et émeut le plus, que ce soit sur le titre "Ma musique", magnifique morceau adressé à son public où l’auteur parle de son art, sa manière de l’aborder et de le présenter, ("ma musique je sais pas ce que c’est, c’est complètement ce que je suis") en s’excusant presque de tant de simplicité ou encore "La mélodie parfaite", dédié à son enfant.
L’artiste nous livre donc un univers intime dans lequel il fait chanter son piano, à moins que ce soit le piano qui fasse chanter Nicolas, quoiqu’il en soit les deux confidents sont inséparables et ne font qu’un. Et ce piano, il le fait chanter sobrement en lorgnant parfois vers les univers chers à Michel Legrand comme sur le magnifique duo avec Grand Corps Malade ("Avant") ou à William Sheller (morceau éponyme "Equilibre instable"). Cet album devrait trouver ses publics, celui de l’univers de la chanson française et celui de la street culture, et il ne serait pas impossible à l’instar de Nicolas que ces deux publics ne fassent plus qu’un. Cet album est le tremplin qui fera passer Nicolas de l’ombre des grands à la lumière des nouvelles révélations.
# 21 avril 2024 : Des beaux disques, des beaux spectacles, une belle semaine
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