Spectacle-cabaret musical conçu par Zabou Breitman et interprété par Jean Claude Deret accompagné par le musicien Vadim Sher et les invités Corinne et Gilles Benizio (Shirley et Dino), Christine Murillo, Olivier Breitman, Antonin Chalon, Giedré et Les mauvais élèves.

Le 29 février est un jour de rattrapage. C'est d'abord celui qui permet de rattraper le retard pris par l'année civile sur l'année solaire, mais la soirée du 29 février 2016 était aussi une soirée de rattrapage pour ceux qui avaient manqué "Cabaret Deret" au Poche Montparnasse, à l'Atelier ou au Théâtre du Rond-Point.

Il fallait alors se rendre Porte d'Ivry, au Forum Léo Ferré. Cette petite salle d'une centaine de places, consacrée presque exclusivement à la chanson d'expression française, peut se targuer de proposer tout au long de l'année une programmation sans concession en défendant une frange d'artistes, amoureux des beaux textes, aujourd'hui presque totalement ignorés des grands média.

Malgré l'absence de communication importante autour de l’événement, la salle était pleine à craquer, et on croisait parmi les spectateurs quelques figures connues comme une violoniste femme de Premier Ministre ou Michel Jonasz.

Jean-Claude Deret, 94 ans aux prunes, est d'abord connu comme scénariste, auteur de théâtre et de séries télévisuelles (c'est lui qui a créé Thierry La Fronde) ou comme acteur. Mais il a aussi écrit une cinquantaine de chansons.

De nombreux artistes de sa famille, au sens littéral et figuré du mot, se pressaient donc autour de lui pour ce "old man show". Proposé par Zabou Breitman, sa propre fille, ce "cabaret impromptu" voyait les invités se succéder au micro entre deux interprétations du doyen de la soirée.

On découvrait Corinne et Gilles Benizio, alias Shirley et Dino, sans leurs costumes d'amuseurs, leur fille Elisa vue récemment dans "Les amoureux de Marivaux" , Giedré qui trouve chez Jean-Claude Deret des textes provocateurs aux thèmes finalement peu éloignés de ceux de son propre répertoire et, bien entendu, Zabou Breitman.

Accompagnés au piano par le formidable Vadim Sher, ancien du cabaret Achille Tonic, tous prennent un plaisir évident à interpréter des textes horriblement ou crûment hilarants.

C'est avant tout la famille bourgeoise que la plume acérée de Jean-Claude Deret tourne en dérision. Lorsque Chabrol décrit, dans son cinéma, la famille bourgeoise comme le lieu des dysfonctionnements les plus inquiétants, Jean-Claude Deret trempe sa plume dans le sang et propose qu'on se repaisse de l'aïeul lors du "Repas de famille". C'est avec "Le Tango du Vieux Con", où il se décrit comme un être absolument abject, qu'il termine ce tour de chant irrévérencieux.

Jean-Claude Deret aura cependant bien du mal à nous faire croire qu'il est aussi abominable qu'il veut bien le chanter. La soirée qu'il a offert avec beaucoup de générosité malgré son grand âge et la joyeuse troupe débordante de talent qui l'entoure nous invitent plutôt à voir en ce fin provocateur un compagnon jovial et un bon-vivant. Pourvu que ça dure...