Ici et là-bas
(Ici d'Ailleurs / L’Autre Distribution / Believe) avril 2016
Sorti le 1er Avril, ce troisième album n’a pourtant rien d’une blague. Après les excellents Notre silence (2011) et Minuit dans tes bras (2013), Michel Cloup continue de se livrer sans artifice et hisse haut les couleurs d’un rock indépendant Français réaliste et sombre.
Des années que l'on suit ses analyses de fin observateur du quotidien, au gré de ses collaborations artistiques. Des années que l'on guette avec impatience les sorties et les apparitions scéniques du Toulousain. S’il nous avait surpris par son retour en formation réduite en 2011, nous avait émus en 2013, rien ne nous préparait à la claque reçue à l’écoute de cet Ici et là-bas qui frôle l’excellence. Le titre est évocateur : ces onze morceaux sont l’occasion d’une longue plongée introspective mêlant souvenirs intimes et portrait sociétal avec en toile de fond un questionnement sur les origines (doubles).
D’entrée de jeu, le sublime "Qui je suis" donne le ton. Le son est plus rock, rêche et l’arrivée de Julien Rufié derrière les fûts (en lieu et place de Patrice Cartier) n’y est pas pour rien ; ce dernier apporte incontestablement un souffle nouveau, en contribuant par ses frappes sèches, à la puissance brute qui se dégage de chaque titre.
La transition est naturelle avec "La classe ouvrière s’est enfuie", portrait désabusé de notre société mondialisée. Le constat est sévère : "Cette faillite n’est pas économique, elle est humaine" et nous rappelle (s’il en était besoin) qu’Expérience était vraiment un chouette groupe. La structure entêtante et le groove accrocheur d’"Ici et là-bas" (en référence à la France et l’Italie, berceau d’origine de la mère de Michel Cloup) complètent cette introduction magistrale.
Les titres suivants jouent avec nos nerfs ; soufflant souvent le chaud (le magistral "Animal blessé" et ses riffs rageurs, le puissant "Séparer" déjà entendu sur la tournée précédente) et parfois le froid (les plus calmes "Deux minutes vingt-cinq" et "D32W").
On pourrait prendre ainsi le temps de passer au crible chaque titre, tant les textes engagés et immédiats, l’atmosphère conférée par ces arrangements minimalistes nous ébranlent. On s’attardera juste sur les deux derniers ; en s'approchant de la fin, les morceaux s'allongent, comme pour mieux retarder l'échéance : "Etranger" d’abord, et sa martiale énumération d’épithètes autour de notre "pays" avant une longue digression sur la notion d’identité, dans l’air du temps.
Puis difficile de résister à "Une adresse en Italie" où Michel Cloup se livre avec une sincérité touchante, en solitaire et sans retenue, au fil d’une ode magnifique à la famille, aux racines, aux souvenirs d'enfance empreints de nostalgie. On pense à Florent Marchet, l’émotion en plus. Les nappes et les tremolos de guitares nous enveloppent et on retient son souffle (pas si simple pendant ces 14’ de mélancolie).
Ce témoignage d’une époque passée fait écho à notre propre vécu et clôt de belle façon un album délicat, brut et viscéral. Touchant. Puissant.
"Je reste car ce n'est pas le moment de s'enfuir". Rien que pour ça, on le remercie.
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