Réalisé par Rachel Lang. France. Comédie dramatique. 1h34 (Sortie le 4 mai 2016). Avec Salomé Richard, Claude Gensac, Swann Arlaud, Zabou Breitman, Lazare Gousseau, Olivier Chantreau, Jorijn Vriesendorp, Noémie Rosset, Driss Ramdi et Thomas Silberstein.
Même le spectateur le plus de mauvaise foi l'admettra en quelques plans : "Baden-Baden" de Rachel Lang n'est pas un premier film français de plus qui répond à l'esthétique et au manque d'idées du moment.
Comme on en a vu beaucoup de ces films "originaux" qui mettent un quart d'heure à rentrer dans le rang et à n'en plus sortir, on a d'abord du mal à croire que celui-ci continue jusqu'au bout sur sa lancée, avec une héroïne si peu conforme aux canons de la beauté Fémis et une réalisatrice déterminée dans ses choix casse-gueule.
Déjà, à quand remonte le dernier film français qui ose filmer la capitale alsacienne ? À part quelques lointaines adaptations d'Erckmann-Chatrian, genre "ami Fritz", c'est peut-être bien la première fois qu'on s'arrête ainsi à Strasbourg. Qu'il y ait eu des millions de morts pour récupérer cette belle province et pas un cinéaste pour la célébrer, ce n'est pas le moindre des charmes de "Baden-Baden" d'en suggérer la pensée.
Ce qui est plaisant dans le travail de Rachel Lang, c'est qu'elle fait son boulot sans s'en vanter, sans dire constamment à son spectateur : "vous vous rendez compte de ce que je vous montre, de ce que je vous dis !"
Cet authentique film féministe ne le proclame ainsi jamais alors que ses personnages féminins sont constamment en train de s'accaparer les symboles de la masculinité. Ana conduit une Porsche, casse des salles de bain, fait l'amour sans amour. Quant à sa grand-mère, elle fume comme un pompier.
Tiens, puisqu'on en parle, Rachel Lang a eu la géniale idée d'en confier le rôle à Claude Gensac et c'est dès lors une telle évidence qu'elle soit là, heureuse de jouer et de surcroît avec la modestie des plus grandes, qu'on en veut illico à tous ceux qui depuis trente ans n'ont pas eu l'idée de la prendre dans leurs films.
L'avantage de "Baden-Baden" de Rachel Lang, comme de toutes les œuvres qui ont un bel avenir devant elles, c'est qu'on n'a jamais l'impression d'en parler, d'en bien parler.
Evidemment, on pourrait se contenter d'écrire qu'Ana vit sa vie au jour le jour et qu'elle est pleine de vie sa vie. Assez pour qu'on ait envie qu'elle devienne une héroïne récurrente. Car, le monde est plein de baignoires à remplacer par des douches, de gens à rencontrer ou à quitter.
Contrairement à Doisnel Antoine, elle n'a pas à se coltiner un réalisateur qui veut en faire un personnage lunaire et poétique. Grâce à Salomé Richard, elle est cabocharde et sympathique, volontaire et fragile. Elle en a sous la pédale, la diablesse !
Allez, on ose le dire : on croit beaucoup en Salomé et en Rachel. On les attend au tournant. Mieux qu'un grand film inutile de Mia Hansen-Love, "Baden-Baden" de Rachel Lang est un petit film que l'on n'oubliera pas. |