J’ai découvert un peu par hasard Keaton Henson, artiste londonien, en 2013 avec son disque Birthdays et ses folks songs dépouillées à l’extrême et sa chanson "You", chanson la plus belle qu’il me soit arrivé d’écouter ces dernières années.
Keaton Henson est un artiste torturé (voir la pochette de son album) déchiré et atteint de nombreuses phobies et crises (angoisse, panique) qui font qu’il reste très souvent dans sa chambre (à composer et dessiner). Ses apparitions sur scène se font rares et précieuses (et très vite complètes). Il "n’aime pas s’entendre", n’accordant que très peu d’interview, répondant par écrit aux questions par des dessins parfois absurdes. Alors évidemment vous imaginez bien à travers la description du personnage que ses disques ne vont pas concurrencer ceux de Patrick Sébastien.
Kindly Now ne déroge pas à sa règle, celle de la tristesse infinie mise en musique. Ce disque est un concentré de mélancolie nous montrant que l’artiste n’en a pas terminé avec ses phobies et son mal-être. Véritable crève-cœur, cet album est une suite logique aux non moins bouleversants Birthday et Romantic Works sortis en 2013 et 2014. Sa musicalité est d’une délicatesse inouïe, Keaton Henson continue de susurrer plus qu’il ne chante pour notre plus grand plaisir.
Keaton Henson fait partie de ces artistes qui savent magnifiquement mettre en musique leur mal-être autour d’une voix tremblante et plaintive, de quelques notes de piano, de quelques cordes (guitare, violon et violoncelle) et quelques cuivres.
L’album débute avec "March", escapade électro qui peut dérouter à la première écoute même si l’artiste nous a déjà sublimés avec des titres électro sur Romantic Works. Viens alors "Alright", titre envoûtant autour d’un piano solo, d’une beauté incommensurable nous donnant les premiers frissons et les premières larmes. Notre souffle n’est pas encore coupé mais presque. "The Pugilist" confirme les douleurs de l’artiste, titre une nouvelle fois déchirant à la guitare lancinante, avec des violons subtils s’affolant sur la fin.
Avec "No Witnesses", les frissons s’amplifient, nous envahissent le corps, Keaton Henson ne susurre plus, il chante et sa voix se pose sur le piano avec une infinie beauté : l’ensemble représentant un peu plus de 5 minutes de pur bonheur. Ce piano-voix est de nouveau présent dans les titres "Old lovers in dressing rooms" et "How could I have known", sublimes tous les deux. Enfin, "Holy lover", chanson en chœur façon gospel a cappella avec "I think I love you" ressassé tout le long du titre, est plutôt surprenante, loin de ce que l’on connait de l’artiste.
Kindly Now reste donc le concentré de mélancolie et de tristesse d’un artiste à la voix éraillée, d’un poète qui a fait de son mal-être non pas son fond de commerce (l’artiste me semblant très loin des considérations économiques de sa musique) mais son cheval de bataille. Cet album est sûrement le moyen pour Keaton Henson de continuer sa douloureuse introspection débutée avec les albums précédents.
En écoutant la confession d’un écorché vif à travers 12 titres bouleversants, on ne sort pas indemne de cet album. L’année se termine dans quelques mois, si je ne devais garder qu’un seul album pour cette année 2016, mon choix se porterait sans la moindre hésitation vers ce petit bijou. J’ai adoré le dernier album de Yann Tiersen mais avec cet album, "adoré" me semble faible pour définir ce que je ressens en l’écoutant.
A écouter d’extrême urgence… pour découvrir ensuite son autre album Birthdays.
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